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6 mars 2013

LIVRE : Plonger les Mains dans l'acide de Claro - 2011

1168242-gfOn continue notre exploration de l'oeuvre de l'excellent Claro avec ce recueil de textes hétéroclites, parus dans différents canards avant de prendre la forme de cet objet bizarroïde qu'on a peine à qualifier de livre. Il y a de tout dans Plonger les Mains dans l'acide, comprenez qu'il y a à boire, à manger et à faire fondre dans une cuillère. Ca va du grand n'importe quoi un peu faiseur aux traits de génie, et comme il y a plus de ces dernier que du premier, on finit par trouver le bazar vraiment pas mal. Les sujets, eux aussi, sont variés, puisque ça va de la soulographie chez les animaux à la morbidité du Manège enchanté, de Gustave Flaubert à Houdini, de la mire télévisée à la beauté des machines à écrire. Quand Claro veut à tout prix faire son poète rock'n roll, il ennuie, et sa méthode tourne court : faussement surréaliste, son style est trop poseur, trop volontaiorement punk pour vraiment apparaître sincère, et le gars pose pour la galerie. C'est le cas par exemple avec "Jumbo en cage", exercice de style vain qui enchâsse les parenthèses dans les parenthèses dans les paranthèses ; ou de ces formules vides et juste clinquantes essaimées par-ci par-là ("American Cream", qui tente de mettre des termes ricains dans la narration, vire au naufrage).

Mais quand le gars s'attaque à un sujet qui semble lui convenir, là ça devient souvent énorme. C'est le cas avec les trois textes qui concluent le livre, où Claro tente de définir, voire "d'incarner", l'écriture de ses idoles : Flaubert, Beckett et Artaud (filiations évidentes, d'ailleurs). La partie sur Beckett réussit le pari d'être un essai littéraire cohérent et de produire en plus une sorte d'ersatz beckettien contemporain, puisque Claro tente ni plus ni moins de trouver quelque chose du style du maître tout en en parlant. Rarement vu un auteur s'approcher aussi près de l'essence beckettienne. Le texte sur Artaud, plus sage dans son écriture, est pourtant magnifique dans ce qu'on y découvre de Claro, de sa volonté de lâcher les chiens dans son écriture, de sa liberté formelle, de son attrait pour le lacher-prise et les mondes parallèles du subconscient. Il faut dire aussi que le gars est dôté d'un solide humour (noir), et qu'on se marre souvent, notamment sur le texte critiquant le Manège enchanté ou ce texte hallucinant où la propre ivresse de l'auteur se mèle à un essai sur la soulographie du monde animal. On atteint parfois une vraie poésie, au détour d'un paragraphe, au tournant d'une phrase, peut-être parce qu'on a l'impression que Claro ne jette rien, garde l'ordinaire comme l'or pur, le raté comme le génie. En tout cas, voilà encore un objet littéraire sous influence et complètement jeté, et éminemment conseillable du coup.

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