Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
7 mars 2013

Sur la Planche de Leïla Kilani - 2012

sur-la-planche
Respects pour ce premier petit film qui a déjà tout d'un grand. Kilani a l'audace de la jeunesse, et elle fait bien, puisque ça lui permet de marcher sans complexe dans la trace de grands modèles, Dardenne en tête, sans avoir à rougir de la comparaison. Comme chez les frères belges, l'héroïne ici montrée est butée, bornée, dangereuse et craquante : c'est Badia, éplucheuse à la chaîne de crevettes à Tanger le jour, petite pépette sexy et voleuse la nuit, qu'on suit à la trace, quelques centimètres derrière elle, accrochés à une caméra nerveuse comme un jeune cheval. Superbement porté par la débutante Soufia Issami (de la graine d'Emilie Dequenne, assurément), le personnage est vraiment superbe, agaçante et glorieuse à la fois. Les dialogues tressés par Benotman aident beaucoup à tracer ce personnage hyper-moderne et urbain : les phrases en arabe sonnent comme des slams, les formules, même quand elles virent au bon mot, claquent avec violence, le tout s'apparente parfois à un chant très contemporain. Du coup, Badia y gagne en brutalité, et c'est tant mieux. Peu à peu, le film nous fait rencontrer d'autres filles, toutes aussi intéressantes, qui vont fomenter quelques coups limite... avant le drame... Petit groupe éclectique de filles sexy et débrouillardes, toutes en gueule et en audace, qui s'apparente à une association de malfaiteurs du dimanche.

sur-la-planche-2011-5-g
Le film évite tous les écueils de ce genre de production. D'abord celui de "la condition de la femme maghrébine dans le monde d'aujourd'hui" : ça pourrait se passer aussi bien à Bruxelles qu'à Rio, et on a bien l'impression que Kilani inaugure enfin un cinéma arabe libéré de sa sempiternelle culture maghrébine. Pas de thèse là-dedans : juste le portrait d'une jeunesse universelle, qui doit lutter contre les classes dominantes et faire avec le monde comme il va. Pas de misérabilisme non plus : le film est sec et aride, simple et droit, ne se complait jamais dans la pitié pour ses personnages. Côté mise en scène, enfin, et même si le côté filmage hystérique à l'épaule peut fatiguer à la longue (c'est devenu un genre en soi), Kilani n'est pas manchotte, que ce soit pour construire des ambiances (les plans sur l'usine de crevettes, sur les soirées de fête, les gros plans serrés sur des visages en mouvement, le rythme très rapide des séquences) ou pour ménager des temps de pause dans le récit : le dernier et magnifique plan, longue contemplation d'un visage au moment du drame final, est magnifique, la comédienne dirigée au poil de millimètre, le timing calculé à la fraction de seconde. Du cinéma d'aujourd'hui, nerveux et rock'n roll, vraiment très très bien.

sur-la-planche3

Commentaires
Derniers commentaires