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9 février 2011

Quelque part dans la Nuit (Somewhere in the Night) (1946) de Joseph L. Mankiewicz

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Un film noir modianesque signé Mankiewicz, faudrait être le dernier des cornichons pour ne pas apprécier. Ce n'est jamais que le second long-métrage du père Joseph, et déjà quelle maîtrise incroyable de "l'appareil cinématographique" - grande élégance dans les mouvements de caméra - et de la mise en scène - inattaquable direction d'acteurs. Même si "l'enquête" menée par le personnage principal, George Taylor (convaincant John Hodiak), suit une pente somme toute classique - un indice qui mène à une adresse qui permet de rencontrer une personne qui vous renvoie à une autre... -, on se lasse pas de ce véritable parcours du "combattant" (notre ami George est amnésique depuis une sale grenade reçue durant la Guerre) qui cherche finalement avant tout des renseignements sur lui-même : incapable de savoir si telle ou telle personne fut par le passé une connaissance, chaque rencontre est une parfaite surprise qui peut aussi bien l'éclairer sur lui-même que lui péter dans les doigts (l'ami Georges ayant eu un passé assez trouble). George a tôt fait d'avoir l'impression de se battre contre des "fantômes" (des personnages rencontrés une première fois "par hasard" qui ne cessent de réapparaître dans son sillage - pure coïncidence qui titille sa paranoïa ou non...) et ne sait franchement plus, au bout d'un moment, à qui vraiment faire confiance - ne pouvant, dans une certaine mesure, pas même se fier à lui-même ne sachant point quel genre d'homme il était... Heureusement, qui dit film noir dit fatalement femmes, il s'en trouvera bien une pour lui rappeler à quoi sert un homme... Un film parfaitement bien huilé qui m'a fait me poser la question suivante (à débattre une prochaine fois, autour d'une bière : "serait-ce bien utile de condamner à la prison à vie un meurtrier frappé d'amnésie ?" C'est moi qu'invite).

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Premières images et déjà on aime ce film (ça se joue à rien parfois) : un type momifié, on ne voit que son regard inquiet, sur un lit d'hôpital, qui se demande, en voix off,  comment alerter le docteur sur sa douleur vu qu'il ne peut ni bouger ni parler et surtout, bon sang de bois, quelle est son identité... Les infirmières et docteurs alentours l'appellent George Taylor, il est prêt à les croire, mais même l'usage de ce nom ne parvient pas à lui rappeler un quelconque souvenir. Il se rétablit progressivement et, toujours en convalescence, trouve une lettre dans son portefeuille, le seul indice sur son passé : il s'agit d'une femme... qui maudit sa race et espère bien qu'il va rôtir en enfer. George Taylor se rend à l'évidence : il était apparemment un gros con. Il décide alors de quitter cet hôpital sans informer qui que ce soit sur son amnésie et part sur les traces de son passé... Il récupère sa serviette laissée trois ans avant dans un hôtel, trouve à l'intérieur  une lettre signée d'un certain Larry Cravat (prononcer "lawwwrry Crawattte" sinon ça le fait pas) qui lui indique qu'il dispose de 5000 dollars à la banque... Tout cela sent l'affaire ultra chelou et notre George de se mettre en chasse de ce Mister Cravat...

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Des types aux tronches de malfrats qui cognent à la moindre occase, une mystérieuse valise en provenance de l'Allemagne nazie bourrée de deux millions de dollars qui se balade dans la nature, des créatures féminines aux sourires si doux et pleines de bonne volonté, prêtes à aider notre ami voire plus si affinités (premier rôle pour Nancy Guild et quelle classe - voilà ce qu'on appelle avoir du chien ; l'autre donzelle aux moeurs un peu plus légères, une certaine Margo Woode qui se plaît à user de mots français sporadiquement, n'est pas mal non plus), des types à l'allure super sympa (Richard Conte en patron de boîte, Lloyd Nolan en inspecteur) dont il faudrait peut-être se méfier... ou non, des cadavres semés ici ou là dont on recherche les tueurs... Plus George Taylor en apprend sur son passé, plus l'histoire se corse... S'il a perdu la mémoire, il n'a pas pour autant tout perdu dans l'histoire puisque la craquante Nancy Guild est rapidement "folle de lui" : elle lui sert volontiers de guide pour l'aider à en savoir plus sur ce type qui se cache derrière cette fine moustache (ou ce "masque", comme le suggèrent justement ceux qui sont pendus au mur chez le voyant, au moment crucial où George dévoilera qui il est...). De petites rues aux boutiques obscures en memory lane, George tend à recouvrer le "fil" de son passé et se rend compte peu à peu qu'il a peut-être bien fait d'oublier qui il fut. Mais la guerre ne lui a pas seulement permis de changer de visage, elle a également eu un impact direct sur sa personnalité...

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Une intrigue finement ciselée (et un ultime petit twist final qui ne gâche rien) qui repose sur des dialogues qui ne le sont pas moins (les diverses réparties féminines (quand les deux femmes sont ensemble, ça fuse), l'excellente séquence de la rencontre entre George et une certaine Elizabeth Conroy où les thématiques du passage du temps, de la solitude, du fantasme sont joliment brassées (comme un concentré des idées abordées dans le film) ou encore celle (l'art de la séduction... ou non) mettant en scène notre gars Richard Conte tentant de persuader la chtite Nancy Guild que ce George (qu'il considère comme un sérieux concurrent) n'est point digne de confiance...). Labyrinthique sans jamais nous perdre, noir sans jamais être dénué d'humour, voilà ce que l'on est en droit de considérer comme déjà une très grande réussite dans la filmographie de Mankiewicz. Grand plaisir et spéciale dédicace (comme à la radio) pour P.M.      

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