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16 mars 2010

Le Chemin du Drame (Shibaido) (1944) de Mikio Naruse

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Alors que la guerre a toujours lieu, Naruse s'intéresse au dur métier d'acteur de théâtre, à un metteur en scène courageux qui, comme le dit sa propre fille, cherche avant tout "à éduquer les gens" quoiqu'il lui en coûte et, enfin, forcément, à une jeune femme qui semble consentir au plus de sacrifices. Récit âpre où, à défaut de voir le jour de la fin de cette guerre, chacun portera, à un moment donné, sa croix en solitaire mais où chacun finira par (re)trouver sa vraie place. Portée par une superbe musique dramatique à souhait et par une interprétation comme toujours magnifique, cette oeuvre de Naruse trouve progressivement le chemin de notre petit coeur qui bat, la petite larme dans l'oeil de l'héroïne finissant forcément par se refléter dans celui du spectateur. 

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Shinzô est un jeune acteur sur la voie de célébrité qui commence par prendre méchamment le melon. Son metteur en scène et mentor, éminemment paternaliste, aimerait bien que cette jeune pousse travaille un peu plus sérieusement pour devenir un véritable acteur. Il contacte alors Hanaryu, également artiste et musicienne, pour qu'elle mette fin à sa liaison avec le gazier : il espère ainsi que, piqué à vif par les constantes critiques dont il assène son jeune acteur et cette rupture, Shinzô décide de partir d'Osaka pour Tokyo dans une troupe qui l'a contacté (...sur demande de notre vieil homme, malin comme un vieux singe), un lieu où il pourra approfondir son art. Encore faut-il que notre jeune gars fasse preuve d'un minimum d'humilité... Hanaryu hésite mais finit par accepter cette étrange proposition, le vieil homme ayant fini par toucher sa sensibilité ("Tu l'aimes comme n'importe quelle autre femme... Tu le veux seulement pour toi" - bon, ok, d'accord). Le plan marche comme sur des roulettes et Shinzô de tomber de haut en arrivant face à son nouveau maître. Pugnace, il parviendra malgré tout à consentir à tous les efforts pour s'améliorer.

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Le metteur en scène continue, de son côté, par monter des pièces exigeantes (il cherche notamment à tempérer l'optimisme forcené du spectateur moyen en ces temps de guerre, ce qui est assez couillu) touchant malheureusement un public de plus en plus maigre. Il n'est point intéressé par l'idée de se faire de la thune mais le propriétaire du théâtre voit les choses d'un autre oeil et commence à lui retirer sa confiance... Hanaryu, elle, a décidé de cesser toutes activités artistiques devenant, telle une Pénélope nippone, une simple couturière. La fille du metteur en scène vient fréquemment lui rendre visite pour la soutenir financièrement, mais Hanaryu, connaissant les difficultés de son père, finit par refuser et décide de se faire oublier... Seul le retour de Shinzô pourrait sortir du marasme la jeune fille et le vieil homme, histoire de leur rendre la monnaie de leur pièce (de théâtre, roh ça va, on peut rire aussi).

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Naruse gère avec parcimonie ces fameux travellings, n'en usant que pour nous montrer nos trois personnages principaux, en proie aux doutes, face à leur solitude. Si le premier, très court, s'attache aux pas de Shinzô, qui, à Tokyo, las des remontrances, décide d'aller de l'avant - il se mettra à bosser sérieusement, dans la foulée -, les deux derniers sont saisissants dans leur parallélisme. Ils suivent le metteur en scène et la jeune fille, abattus par leur sort, s'engageant sur un pont avant de se retrouver, dos à la caméra, appuyés au garde-fou. A deux doigts de faire le grand saut, il semble bien que seul le retour de Shinzô dans leur vie puisse les sauver... Une autre séquence est tout aussi inoubliable, celle où Shinzô retrouve son mentor et sa fille, les trois se retrouvant à genoux, dos courbés, bouleversés. L'ultime face-à-face entre Shinzô et Hanaryu touche quant à lui au paroxysme émotionnel avant d'être dégoupillé par le metteur en scène lui-même, because the show must go on... Bien belle oeuvre du gars Naruse, qui même en temps de guerre, a l'art de nous rappeler l'importance d'icelui et que le "Chemin du Drame" (qu'il s'agisse du travail de l'acteur ou des choix de pièces du metteur en scène) n'est jamais chose aisée...

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