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9 mars 2010

Vladimir et Rosa de Jean-Luc Godard & Jean-Pierre Gorin - 1970

2dl3k8wDu brûlot politique dont on fait la racaille, moi j'dis. Godard et son compère Gorin n'y vont pas avec le dos de la cuillère en bois avec ce manifeste marxiste frontal, qui rend compte dans l'anarchie d'un procès ayant eu lieu à Chicago : sept activistes d'extrême-gauche y furent jugés pour avoir déclenché des émeutes sanglantes. Il n'en fallait pas plus pour que JLG fasse le lien entre ces amis américains et ses propres réflexions soixante-huitardes. Les minutes du procès sont donc reconstituées, mais avec une patte française très marquée : les vrais personnages se mêlent aux personnages de fiction (Anne Wiazemsky ou Juliet Berto au milieu des vrais protagonistes de la chose), les faits sont triturés jusqu'au kafkaisme, les noms sont absurdement bousculés (le juge est appelé de façon chafouine "Juge Himmler"), et ça part méchamment en dazibao anarchiste du meilleur effet.

vladimirrosa2Le côté tract libertaire est merveilleusement rendu par le véritable puzzle formel qu'est le film. On navigue entre le procès proprement dit (des plans fixes sur les personnages braillant leurs convictions, qu'elles soient réactionnaires et bourgeoises chez le juge, ou empreintes de philosophie révolutionnaire chez les accusés) et des décrochages bariolés : affiches rouges, discours politiques, gros plans dreyeriens sur des actrices sacrifiées à la cause, petites scènes scénarisées pour montrer les luttes idéologiques qui marquent le passé des accusés. Surtout, Gorin et JLG se livrent à de drôlatiques mises à distance de leur film, avec de fréquentes incursions de mise en abîme à l'intérieur du métrage : les écrans noirs disposés ça et là, et pendant lesquels on entend Godard expliquer la mise en scène de ce qu'on va voir, avec un accent suisse à couper au couteau hilarant ; et surtout ces séquences où les deux compères (rebaptisés Vladimir et Rosa, donc) échangent des réflexions bégayantes sur le film qu'ils sont en train de faire, le tout sur un court de tennis où se déroule un double. Les balles sifflent à leurs oreilles, et ils ne se départissent pas pour autant de leur flegme helvète : c'est absolument génial.

vladimirrosa1Ca fait du bien d'assister de temps en temps à des films aussi sainement frontaux, qui défendent leurs thèses avec une telle foi. Complexe, fourre-tout, balancé à la mords-moi-le-jonc, Vladimir et Rosa est justement beau et drôle par là-même. C'est un tract, une attaque en règle de la bourgeoisie, de la police, des institutions, de la justice, du patronnat, et de tout ce qui est emmerdant, au profit d'une jeunesse qui tire à balles réelles. Un grand n'importe quoi formel au service d'une sincère tentative d'explosion des cadres : du cinéma, du savoir-vivre, du langage, de tous les cadres. Toute une époque, qu'il serait bon de retrouver de temps en temps.

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