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Shangols
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GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
7 mars 2010

Ballast (2008) de Lance Hammer

ballast

Voilà un premier film indépendant américain qui, s'il n'est pas encore à la hauteur d'une oeuvre des Dardenne, prend le bon chemin et permet - enfin - de se dire que ce "genre" n'est peut-être pas complètement mort. Bénéficiant d'une photographie absolument exceptionnelle sans jamais chercher l'image choc, on sent chez Hammer le genre de cinéaste sans concession qui s'attache à ses personnages, à son sujet, comme une sangsue sur le pied d'un touriste dans la forêt malaisienne. Sa caméra colle littéralement à leurs basques, et il apporte un soin extrême à toujours parfaitement souligner la silhouette de ses individus qui tentent de tracer leur chemin dans le flou de l'existence. C'est vrai que dès le départ de l'histoire, ce n'est pas forcément d'une gaieté de balloche populaire : on découvre une masse véritablement prostrée sur son sofa alors qu'un voisin tente timidement de ballast_poster_fullsizeprendre des nouvelles; celui-ci finit par entrer dans l'appart pour découvrir, comme on l'apprendra plus tard, le frère de cet homme mort dans son lit; notre masse prostrée s'éclipse et se tire une bastos dans le ventre... Youplaboum. Il reviendra finalement s'installer chez lui, et on suivra l'évolution de ses rapports - très tendus - avec l'ex-femme de son frère qui ne le porte pas dans son coeur et surtout son petit neveu. Ce gamin n'est pas non plus vraiment à la fête : il a arrêté l'école, se drogue, s'embrouille avec les cailleras du coin et braque son oncle de temps en temps, ayant récupéré le flingue de son père mort... Youpla bis... C'est vrai que ce n'est pas le film qui vous plie en deux, pas plus qu'il n'a de chance de plaire aux fans de De Funès. Mais Hammer a véritablement un don pour donner une extrême densité et un profond réalisme aux rapports humains qui vont se créer entre ses trois personnages... Bon an mal an, après avoir chacun totalement touché le fond du fond, on a l'impression qu'ils s'engagent, grâce aux petites attentions des uns envers les autres, sur la voie de la rédemption, ou tout du moins qu'un certain espoir est toujours possible : la femme reprend le magasin laissé par les deux frères, le gamin suit des cours à la casa et notre dépressif essaie malgré tout de s'accrocher aux branches... Rien n'est gagné d'avance, Hammer met un point d'honneur, d'ailleurs, à laisser son film son suspend, mais cela n'en donne que plus de force à ces tranches de vie qui essaient de survivre dans la douleur, de gober, dans l'adversité, chaque éventuelle petite étincelle d'humanité. C'est filmé, répétons-le, de main de maître, sonorisé avec une impressionnante précision (et aucun air musical intempestif, Bresson jubile) et interprétré magistralement. Hammer délivre une oeuvre exigeante (ceux qui font rimer le mot avec ennuyante sont des malotrus, hum) et prometteuse; s'il sait éviter toute forme de manièrisme, son second film sera forcément à suivre. Balèze, le Hammer !   (Shang - 06/12/09)

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Fin de mon petit tour parmi les films préférés de l'ami Shang en 2009, avec ce film il est vrai sans concession et diablement bien tenu. On pense en effet aux Dardenne dans cette façon de s'accrocher coûte que coûte aux personnages dans le filmage, quitte à les faire sortir du cadre. Hammer choisit dès le début une technique risquée mais frontale, et la tient jusqu'au bout avec talent. Le film ne va malheureusement pas aussi loin que les frères belges dans le fond, se contentant d'une trame certes intéressante mais pas très fouillée non plus. On s'intéresse donc aux conséquences d'un suicide sur une famille décomposée, du frère jumeau anéanti à l'ex aux dents longues, jusqu'au neveu qui découvre la vie. Très juste, Ballast est toujours à la bonne distance de son sujet, ne tombant jamais dans la thèse ou l'explicatif, cultivant une part de mystère, d'opacité, qui le rend vraiment attachant. On n'explique pas, on montre, dans une sorte de behaviourisme tout à fait américain (on songe aux nouvelles de Carver dans ces scènes ordinaires où la femme doit apprendre à faire fonctioner une épicerie) ; à nous d'imaginer le sentiment qui va avec. Les acteurs, tout en façade, sont effectivement parfaits dans cet aspect "page blanche", espace de projection des spectateurs. Le film ne cède rien, ni en terme de spectacle ni en terme de scénario, et c'est tout à sa gloire. Il y a même par-ci par-là quelques vraies inspirations formelles qui fonctionnent très bien, comme ce premier plan où un enfant court vers des centaines d'oiseaux pour les faire s'envoler, ou comme ce chien qui passe de main en main comme un porteur de message. Mon camarade a tout dit pour le reste. Il a peut-être été particulièrement bienveillant en le plaçant dans les meilleurs films de l'an passé (en face de Von Trier, Tarantino ou Bellocchio, Hammer fait quand même pâle figure, selon moi), mais il a vu juste sur l'espoir qu'on peut placer dans ce cinéaste.   (Gols - 07/03/10)

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