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2 mars 2019

Le Voyage du Ballon rouge (2007) de Hou Hsiao-Hsien

ballon

Le cinéma de Hou Hsiao-Hsien n'est pas du cinéma. Ou il est l'essence du cinéma. Et vu cette intro, je regrette déjà les 38 litres de bière d'hier soir. Hou Hsiao-Hsien ne cherche en rien à faire un remake du film de Lamorisse qu'il a découvert en préparant le film - Simon, l'enfant du film, est d'ailleurs beaucoup plus passionné par sa Playstation que par ce ballon qui vient fréquemment taper à sa fenêtre; en reprenant le motif du ballon rouge, il s'agit uniquement pour HHH -à l'occasion de ce film réalisé pour le 20ème anniversaire du Musée d'Orsay- de faire une sorte de lien entre passé et présent, le cinéaste taïwanais n'étant jamais intéressé que par le Temps qui est passé, qui passe, qui passera - trois fois... Du musée d'Orsay, comme il le dit dans l'interview ultra mal montée des bonus, il n'a finalement gardé que l'immense pendule de cette ancienne gare... et Le ballon ou coin de parc avec enfant jouant au ballon, le tableau de Félix Valloton : on retrouve certes le même objet (ah ouais d'accord!) mais surtout cette notion que l'enfant et les deux adultes en arrière plan semblent dans deux mondes différents, tout en faisant partie de cette même image très "à plat"; les personnages de Hou Hsiao-Hsien font partie du même monde, sont filmés dans le même plan-séquence, tout en semblant évoluer dans différentes sphères : l'ultra-speed Juliette Binoche (sûrement l'un de ses meilleurs rôles à ce jour, franchement), le tranquillou Simon et la zen Song cohabitent tout en ayant leur propre rythme; la seule chose qu'ils semblent véritablement partager, c'est l'absence de leur "monde passé" : le gamin joue au flipper ou se rend au parc, en souvenir des ballades avec son père; Juliette Binoche s'occupe de marionnettes en souvenir de son grand-père et souffre constamment de l'éloignement de sa fille et de son ex-mari qui l'ont "abandonnée"; quant à Song, loin de son monde d'origine, elle traverse ce monde parisien "en aveugle" à l'affût du moindre petit signe familier.

flight_of_the_red_balloon_le_voyage_du_ballon_rouge_1

Si l'intrigue peut sembler parfois un peu lâche (lâche, lâche!), c'est parce que l'ami HHH laisse respirer profondément chacun de ses plans, donnant vie à des personnages qui ne sont point des marionnettes : Juliette Binoche, on l'a dit, est aussi à l'aise qu'un poisson dans l'H2H, endossant à merveille le rôle de cette femme toujours pressée : une fuite en avant, comme pour stigmatiser tous les pans de son passé qui lui échappent. Cette "ballade parisienne" demeure avant tout un voyage en HouHsiaoHsienie qui use jusqu'à la trame et s'amuse sur tous les "plans" de la notion du temps qui passe... Horloge, Dieu sinistre...   (Shang - 20/08/08)

flight_of_the_red_balloon_le_voyage_du_ballon_rouge_3


Mes respects envers Shang, qui a pondu pour ce film une de ses meilleures chroniques. Je suis resté quant à moi un peu interloqué face à ce film, et il m'a fallu l'analyse fine de mon camarade pour arriver à mettre des mots sur le charme infime qui s'en dégage. Oui, c'est très beau, mais assez indicible. On ne sait pas trop d'où vient la beauté de la chose, tant les scènes, prises une par une, ne racontent pratiquement rien : le quotidien pafois triste parfois lumineux de trois personnages qui n'ont pas grand-chose en commun dans le Paris d'aujourd'hui, mais qui vivent ensemble, et qui finalement arrivent à construire quelque chose qui ressemble à une existence. Sous "l'oeil" de ce ballon rouge, mystérieuse bouille ronde qui domine le décor et observe de loin les agissements de ce petit môme, Hou filme le simple déroulement des jours. Et ça respire la vie et l'amour et la tendresse et la mélancolie par tous les bords. Binoche, effectivement excellente dans ce rôle borderline de mère nerveuse, hyperactive et débordée, aborde le personnage difficile et pas très valorisant avec une saine franchise ; Fang Song est son parfait alter-ego, jeune passionnée de cinéma calme et soumise, toujours présente mais effacée ; et le petit Simon Iteanu crève l'écran. Pour le reste, lisez ce qui précède : la théorie shangienne sur les trois temps de récit devrait vous donner du grain à moudre.   (Gols - 02/03/19)

le-voyage-du-ballon-rouge-metro

Commentaires
S
Vous en parlez très bien, de ce regard, de ce rapport au temps, aspects vraiment particuliers chez HHH dans ce Ballon rouge, Café lumière ou Millenium Manmbo qu'il faut que je revois dans de bonnes conditions. Quelques grammes de finesse, dans...
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P
Oui vos trois sphères, c'est tellement juste... <br /> <br /> J'ai beaucoup aimé, HHH est vraiment un maître contemporain, il me fait penser à un peintre, un peintre du temps. Pourquoi ce qui pourrait être si ennuyeux (et l'est dans tant d'autre films poseurs où les plans sont étirés au maximum systématiquement) est-il si passionnant ? <br /> C'en est vertigineux. J'ai regardé certains plans plusieurs fois, tellement je me demandais ce qui se passait, là, pendant quatre, cinq minutes... Rien de spécial (ils discutent, elle lui rend un cd, mange un bout de pain, répond à son fils, etc) ; et pourtant il y a autre chose, une autre dimension. <br /> Et n'est pas le moins étonnant le fait de constater (pourtant il était si tard!) que le film passe à grande vitesse.<br /> <br /> On a l'impression d'assister à un tour de magie, de prestidigitation en regardant tel film; l'impression qu'il sculpte ses propre temps et rythmes, d'où il extrait des formes et variations inédites; et dans la pleine vision de la consistance de ce qu'il filme, regarde.<br /> <br /> Il s'agit d'une acuité particulière, extrêmement aigüe, tendue, et qui est exclusivement cinématographique, et c'est pour cela qu'elle est si belle. On est véritablement dans son regard.<br /> <br /> L'observation des mouvements et visages de Juliette Binoche, que je découvre immense comédienne, est tout simplement fascinante.
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