Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
2 mars 2019

Have a Nice Day (Hao ji le) de Liu Jian - 2017

Have_a_nice_day-710x333

Avouez qu'on a peu traité du film d'animation chinois dans ces pages. Je vous propose donc de commencer par ce dessin animé gentiment référencé, fun à mort, qui compense le côté cheap de son animation par un scénario au taquet et par un amusement constant. Attention, cheap ne veut pas dire raté. Au contraire. Si les mouvements manquent parfois de fluidité, si Liu se contente bien souvent de placer une vague animation sur des décors fixes (rejoignant ainsi une esthétique un peu manga, mais sans les excès), sa mise en scène et surtout son montage sont pas mal du tout. La mise en scène prend en compte l'urbanisme galopant du pays, son aspect le plus sordide et moche, privilégiant les endroits sans charme (cyber-cafés vieillissants, chambres d'hôtel miteuses, routes sans relief), et s'ancre dans un aspect contemporain précis. On est en Chine, avec ses travaux incessants et ses lieux anonymes, paysages qui déteignent peu à peu sur les personnages, petits malfrats du dimanche ou prolos tentés quelques instants par l'appat du gain. L'argent est de toute façon le nerf de la guerre dans cette histoire de magot qui passe de main en main suite au braquage inconscient d'un petit chauffeur, magot qui se retrouvera après 15000 transferts de retour à la case départ. Tous les personnages sont cupides, par habitude ou par occasion, tous rêvent de grandeur mais restent enfermés dans leur pauvre quotidien sans envergure, tous fantasment un monde d'aisance d'où ils sont définitivement exclus. La symphonie impressionnante du film, sons de ville incessants et saturés, enferre encore un peu la chose dans un urbanisme moche. En ce sens le film parle bel et bien de la vie chinoise, est contemporain, et pourrait bien être plus politique qu'il n'y paraît. 

have-a-nice-day

C'est du côté de Tarantino qu'il faut chercher les inspirations de Liu Jian. Comme son modèle, il affectionne particulièrement les dialogues décalés à rallonge, qui décrochent pendant de longues minutes de la trame principale ; comme lui, il a un goût pour la violence sèche, toujours teintée d'humour ; comme lui, il aime les tueurs sans pitié mais philosophes ; et comme lui, il multiplie les plans un peu alambiqués (notamment les tueurs pris depuis le coffre de la voiture où est enfermé un gars, cadre immédiatement tarantinesque). Le scénario même semble piqué au gars, simple prétexte pas sérieux pour multiplier les situations drolatiques et les personnages en porte-à-faux. On est dans la valse des tueurs, qui tuent avant d'être tués, qui se doublent avant d'être doublés eux-mêmes, dans une escalade assez marrante. Tous ont leur raison de convoiter le sac de billets, qui passe de main en main, depuis le mafieux local jusqu'à la soeur cupide, depuis le petit mec qui tente sa chance jusqu'au tueur professionnel, et tous n'éprouvent aucun scrupule à mettre la main dessus, quitte à assommer, endormir, arnaquer, voire trucider le voisin. Toute la fin est un échafaudage de "meurtre dans le meurtre dans le meurtre" très fun, très bien monté, qui suit une logique implacable, et on peut même dire que les acteurs sont bons tant les dessins et la psychologie des personnages sont précis et crédibles : on a droit à un défilé de tronches imparables, chacune ajoutant une part d'humour et d'intérêt au film. Certes, à force de vouloir à tout prix réaliser un polar hard-boiled, Liu oublie un peu, à la longue, de parler de ce qui est le plus intéressant là-dedans, la Chine d'aujourd'hui. Mais on passe 1h20 excellentes devant ce dessin animé à l'ancienne, fait main, qui se montre malin et rigolo comme tout.

haveanice-dwh-20170120-860x484

Commentaires
Derniers commentaires