Gesualdo : Mort à cinq voix (Tod für fünf Stimmen) (1995) de Werner Herzog
Je ne suis pas vraiment ce qu'on peut appeler un grand fan d'opéra (bien aimé en revanche le dernier album des Frigthened Rabbit, voyez le genre...?) mais quand un spécialiste me dit que Gesualdo à son époque était en avance d'au moins trois siècles dans le domaine musical, je suis prêt à le croire les yeux fermés - "ah oui en effet, bel art de la dissonance, quel talent !" (mouais, nan j'y connais vraiment que dalle, ça prend po). Herzog, ceci dit, est loin de se cantonner à nous donner à entendre quelques madrigaux du Sieur, il tente de retracer sa vie en se rendant sur les lieux du château en ruines qu'il a habité, ainsi que divers palazzio dans lesquels il s'est rendu. C'est que le Gesualdo, c'est pas non plus l'homme le plus zen du monde: il a quand même, avec l'aide de compagnons, tué sa femme et son amant (ah la jalousie, ça fait faire des trucs pas jolis-jolis) de 36 coups de couteau, suspendu son fils, qu'il pensait illégitime, pendant trois jours à son balcon en lui faisant entendre sa musique (le gamin est mort, pas sûr que ce soit à cause de la musique quand même) avant de s'en retourner sur ses terres où il a, pour calmer ses nerfs, coupé pendant trois mois tous les arbres de la forêt - Nicolas Hulot conchie Gesualdo. C'est pas commun - on voit forcément ce qui peut passionner Herzog là-dedans - et en plus, apparemment, d'avoir eu des tendances sadomasochistes, le Gesulado aurait terminé sa vie complètement berzingue. Mais, mais, mais, bien que renié de son vivant, son génie a fini par être reconnu à la fin du XIXème siècle par des types comme Stravinsky (c'est pas un film de Resnais ça? - hum, ok, ça va...) qui s'est émerveillé de voir à quel point le type avait trois mille longueurs d'avance. Bien mené, ce petit docu d'une heure est relativement instructif même si Herzog ne peut s'empêcher de vouloir nous faire croire que le château est hanté par un joueur de cornemuse et l'esprit de la femme assassinée de Herzog (sur lesquels on tombe par hasard!, cool)- les deux passages sont un peu tirés par les cheveux, et Herzog d'enfoncer le clou en interrogeant un responsable d'asile qui a deux patients qui se prennent pour Gesualdo réincarné (ne po les faire se rencontrer, c'est la gageure): ok, l'esprit de Gesualdo a fortement marqué les consciences de son époque et continue jusqu'à nous mais cette petite mise en scène est résolument un poil too much. A regarder innocemment et à écouter parcimonieusement (j'avais envie de tester de nouveaux adverbes).
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