LIVRE : Ma Vie d'Homme de Philip Roth - 1976
Fiction, réalité, exorcisme? Roth livre trois versions d'un même récit où il revient longuement sur les ENORMES problèmes de son premier mariage (aller acheter l'urine d'une femme enceinte dans la rue pour se faire épouser, il faut avouer qu'il faut avoir l'esprit assez tordu), ses aventures, son métier d'écrivain, ses relations avec son psy, son enfance, ses difficultés financières et surtout celles qui ont consisté "à tourner la page" après une telle liaison traumatique (je vous passe les séances de suicide à la pelle). En terme de construction narrative et d'analyse psychologique, il faut bien admettre que Roth est vraiment un très grand dont l'écriture demeure toujours d'une grande limpidité; il parvient toujours à donner à ses romans une "vérité", à ses personnages une profondeur qui ne peuvent que scotcher le lecteur dès les premières pages. S'il revient ici tant et plus sur le même épisode de sa vie, c'est aussi bien pour tenter de s'en défaire que pour tenter d'en comprendre les dessous, remettant tour à tour en cause la turpitude de certaines personnes et son propre narcissisme: est-on vraiment toujours responsable de la désintégration de son couple ou est-ce parfois perdu d'avance? Juste quelques lignes en forme de conclusion: "Peut-être que tout ce que je dis là, c'est que les mots étant les mots ne peuvent qu'approcher de la chose réelle, et qu'importe alors que je m'approche plus ou moins, puisque je ne fais qu'approcher. Ou peut-être ce que je veux dire c'est que, pour autant que je puisse voir la vérité, il n'existe pas de moyen de surmonter ou d'exorciser le passé avec des mots - des mots nés soit de l'imagination, soit de la franchise -, pas plus, semble-t-il, qu'il n'en existe d'oublier. Peut-être suis-je simplement en train d'apprendre ce que c'est qu'un passé. En tout cas, tout ce que je peux faire avec mon histoire, c'est de la raconter. Et de la raconter. Et de la raconter. Et cela est la vérité."