La Fièvre monte à El Pao (1959) de Luis Buñuel

Un homme prêt à tout pour sauver son amour (quitte à devenir criminel) puis prêt à sacrifier son amour pour sauver sa conscience et retrouver ses idéaux, tel est le destin de Ramon Velasquez.

Ramon (Gérard Philipe, bon...) va grimper peu à peu les échelons avant d'occuper le poste de gouverneur, bénéficiant à la fois de circonstances particulières (comme le meurtre de l'ancien gouverneur) mais ayant également un grand sens de l'opportunisme. Partant du principe qu'il vaut mieux un gars comme lui dans cette machine dictatoriale que quelqu'un d'autre plus imbu de pouvoirs, Ramon, poussée par l'amour d'Inès (Maria Felix, chaude comme la braise) va éliminer son adversaire direct pour lui prendre sa place(Jean Servais, plus antipathique tu meurs) à grands coups de feintes: Inès passera la nuit avec le Jean puis le poussera à quitter l'île pendant les événements, Ramon laissera une insurrection se développer sur cette île infernale (un immense bagne fait office de main-d'oeuvre gratuite) et le Jean se verra condamné à mort pour désertion, seule atrocité dont il n'est point responsable (c'est tout de même une enflure, prêt à tout pour les beaux yeux d'Inès). Seulement après le soulagement, Ramon et Inès devront faire un choix entre ce pouvoir corrompu de toute part et leur vie amoureuse; Ramon fera soudain volte-face, et au lieu de choisir l'exil à deux restera en place, provoquant ainsi indirectement la mort d'Inès déçue par le comportement de son amant dont elle a en partie favorisé la carrière.

C'est un film relativement moîte sous la chaleur des tropiques, la fièvre qui monte étant plus celle des désirs  inassouvis et de la révolte que celle d'un bonheur partagé. Chacun finit par vouloir jouer son propre jeu et suivre ses propres envies plutôt que de tout quitter pour repartir à zéro. Une île où les âmes tombent facilement malades et il faudra un ultime sursaut pour que Ramon retrouve ses véritables convictions, même s'il lui a fallu sacrifier auparavant sa douce et si en désobéissant finalement aux ordres du président il sait qu'il signe son arrêt de mort. Le destin d'un homme fait de détours tortueux mais qui finira finalement par faire la paix avec lui-même.

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