Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
6 mars 2024

Blier, Leconte, Tavernier, trois vies de cinéma de Chad Chenouga - 2020

Bonheur, bonheur, bonheur, que de retrouver ces trois réalisateurs emblématiques d'un certain cinéma français (disparu depuis), trois petits vieux qui, mine de rien, ont été importants dans l'histoire du film populaire national. Chad Chenouga, brillante idée, les réunit sans façon, leur balance quelques citations-prétextes de cinéastes importants, et les regarde deviser des ficelles du métier, avec une évidente gourmandise. Dès le départ, les personnalités s'affirment, malgré l'estime que chacun porte (ou fait mine de porter) aux deux autres : Blier, fatigué, diminué, joue le rôle du tonton grincheux, peu bavard, à l'humour douteux, qui balance sans vergogne et traite les questions un peu intello avec un mépris total ; Tavernier est le bon élève, érudit, cinéphile, qui aime parler technique, recherche, qui a toujours la citation qui va bien ou l'anecdote qui tue ; Leconte est le gentil gars qui distribue la parole, prend souvent la place de l'intervieweur, balance les vannes et écoute attentivement ses collègues. Entre les trois, la magie opère peu à peu, après un set d'observation très marrant à regarder.

Leurs films ont peu en commun, leur méthode de même, mais ils partagent un amour des acteurs, une cinéphilie, un goût pour l'anecdote et le dialogue, une passion de la discussion (certes moins prononcée chez Blier), qui donnent un résultat génial : pendant plus de 2h30, on suit sans une seule baisse d'intérêt cette rencontre improbable, tout comme Chenouga qui a compris qu'il n'y a pas besoin d'en faire trop : le dispositif est simplissime, les trois disposés en triangle sur fond noir, le montage discret, la ponctuation d'extraits des films très justement mesurée. Avec eux, c'est tout un âge du cinéma qui resurgit, une façon de regarder les acteurs, d'écrire, de se renseigner sur le contexte, de monter, de s'intéresser à la distribution ou à la production, bref une autre façon de faire du cinéma. On en apprend de belles sur Coluche (la bête noire de Blier) ou Rochefort (celle de Leconte, avant les retrouvailles énamourées) ou Bernard-Pierre Donnadieu (on imagine mal Tavernier en venir aux poings, et pourtant...), on rigole devant les petits arrangements de chacun pour arriver à ses fins, on se re-souvient avec bonheur (ou pas) de tous ces films qui ont jalonné notre jeunesse, de Viens chez moi j'habite chez une copine à La Mort en direct, de Buffet froid aux Bronzés, de L'Horloger de Saint-Paul à Beau-Père, et on savoure ce film comme un bon petit whisky. Le troisième épisode est consacré à ce que que chacun aime du cinéma des deux autres, et là encore on est tout étonné de voir l'amour de Blier pour Les Bronzés, ou de voir avec quelle admiration Tavernier a suivi la carrière de Blier, alors qu'on pensait ces trois cinéastes si différents peu passionnés par ce que faisaient leurs collègues. Et on se prend à rêver que Chenouga ou un autre reproduise ce modèle si simple avec d'autres trios (un "spécial années 80" avec Besson, Jeunet et Carax, un "cinéastes barrés" avec Mandico, Peretjatko et Noé...)

 

Commentaires
Derniers commentaires