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20 février 2024

LIVRE : Il était une Fois en Amérique / A Main armée (The Hoods) de Harry Grey - 1952

41TUHs3YqULIl fallait bien un jour que je me plonge dans ce roman de Grey, celui-là même qui a donc inspiré Leone et son armée de scénaristes. Ce Grey, petit voyou qui finit derrière les barreaux (cela donne forcément le temps d'écrire), ce petit fils d'émigré juif qui s'est fait son chemin à coup de surin, ce Noodles un peu bravache dont les propos envers les homos voire même envers les femmes ne sont guère reluisants, nous plonge dans ce petit monde de la mafia de la grande époque avec une plume plus aiguisée que prévue. Notre mafieux dans l'âme va donc nous faire le récit de ce gang (de cinq gaziers moins un... ce putain de petit glissement dans le film qui fut fatal à l'un d'eux...) de leur enfance à leur mort et nous raconter par le menu tous les gros coups sur lesquels cette bande, aux ordres de la grande "coalition mafieuse", va intervenir aux cours de ces années marquées par la prohibition : des braquages de bijouterie, des actions syndicales pour prendre le contrôle de divers lobbies, des règlements de compte sanglants et turpides entre mafieux, des disparitions de cadavres grâce à leur entreprise de pompes funèbres, des enfumages d'investisseurs avides de fabriquer des faux billets, du trafic d'alcool... On en a pour notre argent dans la description de ce milieu, de ce réseau tentaculaire, et des actions d'éclat dans lesquels le gars Noodles auprès des siens peut se "vanter" d'être sauvagement intervenu... Notre homme n'est pas avare en détails ni en dialogues et son récit, disons-le puisqu'il s'agit tout de même d'une bonne surprise, est aussi vif que vivant. On comprend vite qu'il se montre un peu plus beau qu'il ne fut, que sa morale est aussi basse que son comportement en règle général vis-à-vis des femmes, mais on a là indéniablement un récit de première main, un compte-rendu qui décrit avec un certain réalisme l'emprise totale de la mafia sur la société d'alors (flics, politiques, hommes d'affaires, avocat etc...).

On se reprend ainsi une sorte de petit bain de jouvence qui nous permet de retrouver le parfum de l’œuvre de Leone, remarquant ô combien au passage ce dernier n'a gardé que certaines grandes lignes de ce récit. C'est justement là aussi tout l'intérêt de cette lecture : voir comment Leone a su complexifier sa narration et ne garder que quelques caractéristiques particulières dans le parcours de ce petit malfrat mal dégrossi. On retrouve surtout certains personnages dans leur grande ligne (de ce Max mégalomane à cette sado-masochiste qui eut un certain impact sur le petit clan en passant par l'intouchable Dolorès-Deborah, ce bon vieux Fat Moe ou ce petit syndicaliste naïf) mais on voit surtout tout le travail de Leone pour donner du poids à ces différentes figures et à cette complicité au sein de la bande, ou encore pour dynamiter certains de leur coup d'éclat ; on peut même essayer de réfléchir à la fameuse théorie du "rêve de la fumerie d'opium" (toute une partie du film ne serait d'après certains qu'une projection de l'esprit de Noodles sous opiacées) en comparant tout ce que Leone a rajouté comme digressions au récit très linéaire de Grey (on en finira de toute façon jamais d'avoir sa propre petite interprétation par rapport à cette œuvre labyrinthique de l'ami Leone). Voilà en tout cas un roman roboratif (600 pages qui pèsent leur petit poids) qui nous fait, presque malgré nous, entendre à chaque fois que Cockeye se saisit de son harmonica la petite musique (fabuleuse, j'insiste !!!!) de Morricone... Toute la magie du cinéma de Leone qui a comme phagocyté et rendu immortel (on sort les grands mots !) ce récit raconté par le petit bout de la lorgnette. Once upon a time... and a good time etc... 

Commentaires
S
Je ne vous dirai point tout, mais disons que Leone fait un peu dans la surenchère... Le discours sur les femmes, en général, par Noodles, comme je le disais, n'est pas vraiment pro meetoo...
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C
Passionnant, ça donne envie ! Vu ce que vous dites, le livre semble adopter un point de vue plus critique, plus profond sur la politique et pas du tout avec un ton mélancolique. Est-ce cela ?<br /> <br /> Par ailleurs, y a-t-il les deux viols ? Pendant un braquage aussi ? (Pas banal, ça) Avec la même ignorance des femmes ?
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