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Shangols
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12 août 2023

Noël blanc (White Christmas) de Michael Curtiz - 1954

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Shangols joue la contre-programmation en ce mois d'août en vous proposant le film le plus sirupeusement noëlique du monde, le genre de machin où le moindre flocon de neige tombe au son d'une musique angélique, sous le sourire béat d'acteurs tout en gentillesse bon enfant. Là, en plus c'est une comédie musicale, autant vous dire alors qu'on n'aura pas droit à de gros soucis traumatiques après la vision. Voici donc deux anciens potes de l'armée qui décident de monter un duo de music-hall, qui connait vite le succès. Ils rencontrent deux girondes sœurs elles aussi danseuses et chanteuses, décident que tant par le talent que par le fessier elles les intéressent, les suivent dans le Vermont, et montent avec elles le plus fantastique spectacle qu'on ait vu de mémoire de montagnard. Le tout sur fond de petits caprices féminins, de gros sabots masculins, et d'hommage à leur ancien général en retraite : oh la la que de soucis sous le soleil, tant dans la préparation insensé d'un gros spectacle en pleine campagne que dans la gestion des tourments sentimentaux des uns et des autres. Je vous rassure tout de suite : ça se terminera par des grosses pelles échangées sous le sapin, sur fond de paysage édénique recouvert de neige, au son d'une chanson nostalgique qui aurait fait vomir Richard Clayderman tant elle est sucrée.

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Bing_Crosby_and_Danny_Kaye_in_White_Christmas_trailer_2

Bah c'est Hollywood en plein, c'est-à-dire le genre de produit programmé pour vous faire oublier vos soucis, si possible dans les bons sentiments les plus œcuméniques. Mission réussie donc : le film est d'une gentillesse totale, baignée d'une lumière de studio étudiée au millimètre, rempli de personnages bien coiffés et costumés grand crin qui virevoltent et poussent la chansonnette en vrais professionnels. Ça joue sur la nostalgie des Noëls de notre enfance (innocents et blancs, donc), en même temps que sur un chauvinisme un peu gênant et un éloge de l'armée et de sa solidarité. Tout le truc repose sur le fait qu'il faut monter un gros spectacle à la barbe du général pour qui il est organisé, sans qu'il soit au courant car sa modestie en serait touchée. Or, le film se dirige entièrement vers ce mélodrame que les personnages veulent absolument éviter, et nous en donne effectivement pour nos larmichettes dans sa dernière bobine. Aaaaah les hommes entre eux, c'est bien bordel, même si les gonzesses c'est sympa aussi. Bing Crosby et Dany Kaye, vedettes du moment, ajoutent leur physique de premier de la classe et leur blagues à deux balles au tableau. Certes, ils dansent pas mal, certes ils ont une voix de crooner, mais leur jeu de comédien est désolant, et le scénario leur octroyant des scènes sirupeuses à mort, ils s'enterrent eux-mêmes assez vite. Face à eux, deux oies blondes leur servent de faire-valoir, bon, on n'est pas dans les grandes heures de l'Actor's Studio.

white-christmas-michael-curtiz

Restent les nombreux morceaux musicaux, heureusement. On apprécie l'élégance des chorégraphies, pas seulement dédiées aux quatre protagonistes principaux mais qui donnent la place aussi aux danseurs secondaires (tiens, on aperçoit George Chakiris), et on salue l'invention de certaines d'entre elles (le ballet en duo dans lequel tente de s'immiscer un troisième larron, très bien foutu). Les chansons sont mièvres, oui, mais certaines sont elles aussi bien troussées, et chantées avec talent. Et puis on a le droit d'aimer aussi ce cinéma de déconnexion d'avec le réel, et cette période où Hollywood était une usine à rêve assumée comme telle. Le film le moins grave de la chrétienté, c'est vrai, mais pas le plus moche, définitivement.

Commentaires
S
Ce qu'il y a de passionnant, de stimulant, avec ce genre de film, c'est de traquer ce qui se cache dans l'interface.<br /> <br /> Nous avons là un pur produit du système hollywoodien. Dans un genre hyper défini et calibré.<br /> <br /> Maintenant, où débusquer "l'oeuvre" dans le produit ? Quid de l'auteur dans toute cette fabrique manufacturé ?<br /> <br /> Quelle est la part de l'oeuvre curtizienne dans cette production pré-emballée? <br /> <br /> Quelle est la marge d'invention des acteurs face à un scénario et des dialogues hyper convenus? Quelle part de liberté de mouvement, de gestuelle, dans un genre -la comédie musicale - où le mouvement est si puissamment réglé ? <br /> <br /> <br /> <br /> J'ai vu ce film il y a une dizaine d'années (et votre image du haut fut, à un moment, mon fond d'écran). Et je me demandais pourquoi, avec un sujet aussi rachitique, riverain de l'indigence, avec ce déploiement hyper bourratif d'effets de couleurs, de gesticulations, de tintamarre, on trouve cependant un vrai plaisir à regarder cette chose ?<br /> <br /> <br /> <br /> Curtiz pèse, avec une conscience ( un art !) qui l'honore, chaque gramme qui va rythmer son "racontage". Avec un découpage/montage quasi métronomique. Un vache de virtuose dans le point-contrepoint. On sait que c'est le champion du "comment raconter", de l'ellipse, du on va "droit à l'essentiel, mais grâce à des détails". <br /> <br /> Or là, pourtant, rien d'essentiel dans cette histoire à la mords-moi-le-noeud. Et malgré tout, la main du maestro est éblouissante. Comment arrive-t-il, nom d'un chien (pardon Hamster), à nous embarquer dans ce récit à l'argument aussi tartignole? <br /> <br /> Ne nous laissons pas aveugler (genre les gars du code Hays, qu'on pouvait berner en leur mettant bien sous le nez le gros arbre qui devait cacher la forêt des licences!) par ce qu'on voit en premier: la grande machinerie et les poncifs (que vous-mêmes n'évitez pas dans votre chronique. ), jetez plutôt les regards ailleurs. <br /> <br /> <br /> <br /> Et, non, je ne peux pas laisser dire que le jeu de Bing Crosby est désolant. <br /> <br /> Si vous n'avez pas vu qu'il était le champion de "l'underplaying", de la "cool attitude", de l'ironie souriante, de la petite étincelle qui pétille dans l'oeil juste au moment de la roucoulade convenue, ben merde (sorry Hamster) c'est que vous en avez dans les rétines ! <br /> <br /> Pour vous les nettoyer un brin, voyez ce bon petit film carré, pudique, bouleversant sans en rajouter, "Little boy lost" de Seaton, où Bing est juste "perfect". <br /> <br /> <br /> <br /> Bing, c'est LE ROI de la distance et de l'autodérision. Vous l'ignorez parce que vous ne l'avez pas assez vu ("Ouais, bof, ce crooner qui bêle? Envoie-nous plutôt "Body double"), ou pas assez (c'est-à-dire vraiment) "regardé" ?<br /> <br /> Contrairement à ce que vous dites dans la chronique, ce sont bien des artistes cool, de la trempe de Bing Crosby, qui ont ouvert la brèche de l'Actors Studio, lequel n'est pas sorti de nulle part. <br /> <br /> Ceux-là, ils ont même le mérite d'avoir, les premiers, découvert et employé, les fameux "trucs": attitude en retrait, geste décalé, ébauches d'expression, devant une caméra (n'oublions pas que Stanislavski c'était d'abord au théâtre)<br /> <br /> <br /> <br /> Cela me consterne d'autant plus que vous le fourriez dans le même sac, par une simple formule, qu'un Danny Kaye qui n'a pas du tout, mais alors pas du tout, la distance ironique, l'envergure de Bing, et est loin de posséder une palette de jeu aussi nuancée !<br /> <br /> En outre, Crosby garde une dimension tragique (y compris en comédie) que n'a jamais eue un Kaye. (Kaye rame déjà beaucoup pour nous faire rigoler, et a très mal traversé le temps).<br /> <br /> <br /> <br /> Donc, merci de ne pas confondre serviettes cachemire grand luxe avec la pile draps de plage Kiabig pur polyester, s'il vous plaît. <br /> <br /> <br /> <br /> Et , non, non, et non, les "oies blondes" ne sont pas leur faire-valoirs ! M'enfin !!!.... Kess que... ??? Mais Jamais !!!!<br /> <br /> C'est même plutôt elles qu'on voit le mieux, et qui ont les deux autres pour les mettre en avant ! <br /> <br /> Voyez ça de plus près... Si. Si. <br /> <br /> <br /> <br /> Au reste, elles ont un nom, ces "oies" ! Pourquoi vous ne citez pas les noms de ces comédiennes ??? Hein ? <br /> <br /> <br /> <br /> Allez écouter Rosemary Clooney dans ses sessions avec Duke Ellington. Elle est excellente dans ce film, vu ce qu'elle a à y défendre. ( Vu ce que TOUS ont à y défendre, réalisateur inclus).<br /> <br /> <br /> <br /> Quant à Mitzi Gaynor... ben, c'est Mitzi Gaynor, bon sang. Une pointure de la comédie musicale. Bien plus subtile comédienne, plus expressive, qu'une Cyd Charisse, par exemple (cf. "Les Girls", de Cukor). <br /> <br /> <br /> <br /> PS : à toutes fins utiles: The great Irving Berlin, juif, écrivit cette chanson de Noël chrétien, en pleine guerre. Moi, pour le coup, ça m'émeut vraiment.
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