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8 août 2023

Oppenheimer de Christopher Nolan - 2023

Sans titre

Certes, on en a pour le prix de son billet de cinéma en allant voir Oppenheimer, et Nolan ne s'épargne pas dans ses effets et ses efforts pour nous en mettre plein les mirettes (et plein le cornet acoustique par la même occasion). Mais était-il bien nécessaire de sortir un tel barnum pour narrer cette existence somme toute secrète et grisâtre, uniquement occupée en son centre par l'événement certes fabuleux de l'invention de la bombe atomique ? Moi j'en doute, et comme je suis sorti lessivé de ces trois heures de bruit, de chaos, d'infos, de musique et de plans ininterrompus, j'en viens même à me dire : tout ça pour ça ? On n'attendait certes pas le chantre du spectacle à tout berzingue dans ce registre-là, mais très vite on découvre le pot aux roses : Nolan fera du bruit quel que soit son sujet, qu'il filme Batman ou la naissance de la flore des Alpes.

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Bon. On prend acte, on met ses bouchons d'oreille et on regarde bienveillamment ce biopic tout en coups d'éclats de Robert Oppenheimer, ancien sympathisant communiste fan de physique quantique, inventeur d'une méthode de fission de l'atome bien utile à l'heure où les nazis attaquent. Contraint à la course à l'armement, notre homme va monter une équipe de fines flèches pour fournir une Grosse Bombe avant les Allemands et ainsi mettre fin à la guerre. Et tant pis si les nazis rendent les armes avant la fin des recherches, on la balancera sur les Japonais. Et tant pis si ça ne met finalement pas fin à la guerre, l'important est de s'armer pour le futur. Jonglant avec la morale et ses convictions, vacillant à l'heure du grand boum, accusé dès lors d'opinions gauchistes peu à la mode, Oppenheimer est un beau personnage tout d'ambivalences, dont Nolan ne cache pas les ambiguïtés. C'est la partie intéressante du film : on y découvre un personnage fort, pas très sympathique, et traité avec un sens de la nuance auquel le cinéaste ne nous avait pas habitués. On ne nous cache rien des tergiversations éthiques de ce génie scientifique trop préoccupé par l'objet de sa recherche pour se rendre compte des manipulations dont il est l'objet, pris en flagrant délit de déni une fois l'horreur d'Hiroshima accomplie, tourmenté par ses femmes (sacrifiées pour le coup par le film), et on sort de la chose édifié et un peu moins con. Les acteurs font un très bon job, on a l'impression d'avoir fait le tour de tout ce qu'il y a à savoir sur cette sombre affaire de super-bombe.

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Cela étant dit, autant vous prévenir que vous serez proche du malaise à la sortie. Nolan sature littéralement son film d'informations, livrées en saccades. Vous ratez trois secondes, c'est tout un réseau d'espionnage qui vous passe à côté, ou un tournant capital dans le destin d'Oppenheimer. Le film demande une attention totale pendant trois heures, Nolan n'a pas dû apprendre l'art de la pause ou du contrepoint. Mais comme ça ne suffit pas, il noie aussi l'ensemble du métrage sous une musique envahissante ; sans mentir, il doit y a voir 15 minutes sur les 3 heures où il n'y a pas de musique. Celle-ci envahit tout, les dialogues, les scènes les plus banales, les moments de tension comme les moments calmes. Comme elle est conçue pour être le plus tendue possible, chargeant sans raison la moindre séquence de suspense, on a vite l'impression d'assister à une énorme bande-annonce pour le film, plutôt qu'au film lui-même. Le principe est toujours le même : la musique démarre doucement dans une scène de dialogue (quitte à le noyer complètement), puis monte doucement pour éclater dans un plan d'ensemble de façon tonitruante... puis rebelote avec la séquence suivante. Un principe qui a tout du système, et qui fatigue beaucoup. On a l'impression que, se rendant compte que son histoire manque un peu d'ampleur, Nolan a voulu en fabriquer de façon artificielle. Ajoutez à ça un formalisme usant (ce noir et blanc clinquant mais injustifié, ce montage qui jongle avec les temporalités, ce suspense plaqué au moindre petit événement), et un goût pour le son poussé à fond, et vous vous retrouvez au final face à une coquille qui a l'air un peu vide, mais qu'on vous fait passer pour pleine. Il y a des bons moments, certes, dont le moindre n'est pas la fameuse explosion, excellent moment de tension, mais on quitte la salle trop épuisé pour émettre le moindre jugement. Un film qui gagne par KO du spectateur.

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Commentaires
A
je vous trouve bien dur avec Nolan. Le bonhomme en fait effectivement des tonnes (rien de nouveau) mais quand même arriver à obtenir un très gros budget pour faire un film où on vois Nils Bohr, Albert Einstein et Enrico Fermi c'est un peu mieux que de se faire sponsoriser par Mattel.<br /> <br /> Nolan a toujours les mêmes tics (montage alterné mais un peu moins frénétique que d'habitude) mais j'aime bien le caractère non manichéen du propos ce qui pour' un film hollywoodien n'est pas vraiment la norme<br /> <br /> s'agissant du noir et blanc mon hypothèse est qu'il est utilisé pour que le public américain ne se perde pas trop dans les histoires parallèles en isolant au moins une d'entre elles
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