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Shangols
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GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
5 mars 2021

SERIE : Johnny Staccato - 1959-60

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Alors là, avouons qu'on est dans le pur petit plaisir de grand fan du noir et de l'ami Cassavetes. Vingt-sept épisodes visionnés chaque jour religieusement, autant de récits dans lesquels le pianiste et détective Cassavetes aura pu démontrer son sens du courage, du fighting spirit (il excelle dans ses prises de judo), de l'amitié, de la justice. Il ne faut pas venir sur les terres de John ni venir ennuyer ses potes. Les histoires se terminent généralement par des coups de feu et les cadavres (amis ou ennemis) se ramassent à la pelle. Emmené par une petite musique jazzy signée Elmer Berstein (les geeks musicaux pourront également reconnaître par deux fois John Williams, himself, au piano), chaque épisode plie l'affaire en vingt-cinq minutes chrono. Réalisée par d'excellent seconds couteaux du genre (John Brahm, Robert Parrish, Joseph Pevney, Boris Sagal, Richard Whorf, Robert B. Sinclair ou encore Paul Henreid pour les fans de Casablanca), cette petite série diffusée sur deux années tient frauduleusement la route : un night club où chaque soir les jazz sessions s'enchainent, de sombres rues de New-York pour servir d'écrin, et un détective qui a fort à faire pour régler les histoires de gang, les vengeances, les chantages, les jalousies, les embrouilles et ce quelles que soient les communautés...

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A tout seigneur tout honneur puisque John Cassavetes lui-même a réalisé cinq épisodes (et sûrement l'un des summums de la série) : Murder for credit met en scène un musicien victime d'empoisonnement (des femmes jalouses ou un entourage toxique et revanchard ? - Martin Landau et son regard hagard campe un suspect idéal...), Evil s'intéresse à la vie d'un prêcheur avide de gros sous (beau parleur, charmeur, les ouailles décérébrés suivent ce diabolique homme de religion les yeux fermés - la présence d'Elish Cook en alcoolo est un petit bonheur en soi ; gare aux bonimenteurs qui prennent dans leurs rets par leurs discours rôdé les naïves âmes - heureusement, Staccato veille), dans A Piece of Paradise il est question d'un ancien jockey (victime d'une très sale chute quelques années auparavant - c'est un proche de Johnny) suspecté d'avoir tué une danseuse de revue dont il était tombé fou amoureux, sûrement au grand galop - coupable, pas coupable ? Staccato prend sa défense autant que faire se peut - l'amitié vs la justice), Night of Jeopardy est un épisode très musclé où des faux-monnayeurs mettent la misère à Staccato (il a deux heures pour écumer la ville à la recherche d'un mystérieux paquet pour sauver ses proches pris en otages) et enfin le très classieux Salomon, la pépite du lot : un huis-clos à trois entre Elisha Cook, en avocat cette fois (le seul acteur, hors commissaires et musiciens, à faire deux apparitions dans la série sous deux rôles différents - et il est bien entendu à chaque fois génial), Johnny Staccato et l'accusée Cloris Leachman (cette ardente (et sublime) pacifiste est accusée d'avoir violemment assassiné son mari à coups de couteau) ; ce cinquième épisode réalisé par Cassavetes donne à voir un Cook grandiloquent, à moitié starbé, avant que l'action ne se concentre dans une cellule où les champs/contre-champs sont tendus comme une arbalète et où les jeux sur les ombres sont absolument magnifiques. Cassavetes en interrogateur implacable pousse l'accusée jusque dans ses derniers retranchements - c'est noir, c'est rude, c'est sans pitié. C'est du pur jus.

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Difficile de donner un modèle pour chaque épisode, les variations sur le thème du ou des coupables étant multiples. On assiste généralement, au départ, à un meurtre ou à la fuite d'un type qui se sait menacé. Staccato est rapidement contacté pour tenter de démêler l'écheveau en un temps record. Entre deux enquêtes, notre bon Johnny discutaille avec le second personnage récurrent de la série (l'expérimenté Eduardo Cianneli as Waldo, le tenancier de la boîte de jazz du même nom), joue quelques notes au piano avec un air inspiré ou traque la gorette, brune ou blonde, qu'importe, mais toujours assez bombasse. D'autres individus font plusieurs apparitions dans des rôles récurrents (Frank London as Shad, un démerdard dans le "milieu", toujours prêt contre quelques billets à donner une piste ; divers commissaires et musiciens dans des rôles plus secondaires) mais ce sont surtout les guest stars qui donnent un éclat particulier à la série. Deux actrices, en particulier, illuminent la série de leur présence : Gena Rowlands, of course, encore toute jeunette, est éclatante dans l'épisode intitulé Fly, baby fly ; c'est indéniablement le plus glamour de tous : Gena et John se retrouvent côte à côte dans un avion alors même qu'une valise cache une bombe ; John a été piégé par l'ex de Gena et cette première rencontre a des allures de coup de foudre en direct... On se retrouve tout guimauve lorsque la Gena s'endort et se réveille sur l'épaule de John alors même que la menace est à son comble... Autre épisode à vedette féminine, Tempted, avec la présence de l'éblouissante et vénéneuse Elizabeth Montgomery : elle échange au passage avec le John un long baiser langoureux et sensuel et l'on sent que la belle est prête à tout pour couler des jours heureux - amoureuse ou purement vénale, là est la question.

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D'autres acteurs surprises feront leurs apparitions (citons Dean Stockwell, Paul Stewart (l'homme aux sourcils), Michael Landon (sans prairie), John Hoyt, Tom Reese (et son gros pif),... et une pléiade de donzelles à se pâmer). La série fait des incursions dans de multiples milieux et autres communautés (hispano, black, asiatique, germanique, russe... et même une frère et sœur communistes - là encore, au sein même d'une petite ville (A nice little Town, le seul tourné hors NY), Staccato se dresse contre toute la population pour faire cesser les discriminations de toute sorte, les procès d'intention), Staccato prenant toujours la défense des opprimés. Parmi les épisodes les plus marquants au niveau du scénar, on pourrait citer Double Feature avec deux Cassavetes pour le prix d'un (il joue un méchant... d'origine canadienne avec un petit air pervers qui semble le combler), An act of Terror qui met en scène un ventriloque schizophrène (!!! oui, finalement, c'est peut-être un peu prévisible), The Return où il est question (comme dans d'autres épisodes d'ailleurs) d'un ancien de la guerre de Corée qui peine à retrouver ses marques et surtout à reprendre une relation "normalisée" avec son ex (l'essence même du noir), The Poet's Touch qui nous plonge dans l'ambiance un poil hippie du Village (mais un milieu là encore empoisonné par le meurtre...) ou encore The Parents où un jeune couple se mord les doigts d'avoir vendu leur enfant (ça arrive...). Staccato est l'ultime recours, celui qui est toujours prêt à se prendre des mornifles ou des balles à la place de ses clients ; il reste tout le temps droit dans ses bottes, laisse toujours sur la banquette sa dernière conquête quand le devoir l'appelle, fait toujours preuve de pugnacité même dans les moments les plus désespérés (ne jamais s'approcher trop près de lui quand on a une arme...). Il sauve des musiciens, des jeunes cons, des sportifs, des types de la haute, des femmes aux abois, des suicidaires, des types désespérés, ruinant ses costumes en faisant des roulés-boulés, utilisant son direct du droit quand on le chauffe, dégainant son gun en dernier ressort - parfois, oui, il tue ses adversaires mais toujours en état de légitime défense. Bref une belle gueule, une sourire inimitable, du touché, du doigté, du charme, et du chien, un véritable gentleman-détective... Sans mon petit Staccato quotidien, me voilà tout orphelin. Une grande série ultra punchy et bourrée jusque-là de durs gangsters et de pures créatures de rêve (tous ces plans sur des jambes féminines, pfiouuu...) - avec en prime un Cassavetes déjà légendaire à tous les postes. INCONTOURNABLE.

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 Tout Cassa à la casa

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