Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
18 juin 2020

SERIE : Au Royaume des fauves (Tiger King) d'Eric Goode et Rebecca Chaiklin - 2020

BRXRJW2SMAOYOQ7OX3FLHLY3LU

Un véritable gâchis, voilà ce à quoi on assiste dans cette série documentaire aussi hilarante que terrifiante, qui nous présente une tranche de pitoyable vie reposant sur un énorme malentendu : au départ en effet, les protagonistes de Tiger King aiment les animaux, et à ce titre ont tout mis en place pour les préserver. Voici donc, d'un côté Joe Exotic (oui, c'est un pseudo), le geek le plus fêlé que vous puissiez concevoir, coupe-mulet blonde platine, flingue commasse à la jambe, voix de Daffy Duck, homo jusqu'au bout des ongles, un paquet de névroses et de paranoïas mal assimilées en liberté, propriétaire du plus grand parc de fauves des Etats-Unis : 200 bêtes féroces qui tournent en rond dans leurs cages et auprès desquelles notre bougre gambade gaiement. Son équipe d'entretien : un ramassis de gueules cassées, d'anciens taulards, de déviants, auxquels il manque tous au moins un membre ou les dents supérieures. Face à lui : Carole Baskin, veuve millionnaire un peu louche qui a décidé qu'elle seule savait comment préserver les tigres, a donc ouvert un parc concurrent, et qui a fait de l'existence même de Joe Exotic son combat de toute une vie. Entre ces deux-là, la haine se fait de plus en plus forte ; au début, ce ne sont que des invectives balancées par médias interposés (la dame a son émission télé, le bougre a signé pour une émission de télé-réalité et réalise des clips à faire se pâmer Mike Brant), mais bientôt, menaces, malversations, incendies criminels, procès puis tentative de meurtre vont advenir, sous l'oeil mi-amusé mi-impliqué jusqu'à l'os de témoins tous plus ou moins louches... Quand on a dit ça, on a dit qu'une toute petite partie du scénario aberrant qu'on voit se dérouler d'épisode en épisode, chacun d'eux apportant son lot de coups de théâtre, chacun nous présentant un nouveau personnage encore plus dangereux et fêlé que le précédent.

twitter-in-stream-wide-tiger-king-carole-baskin

J'adore les séries documentaires, mais il faut reconnaître que celle-ci dépasse carrément toute fiction qu'on puisse imaginer. Disons quand même que les réalisateurs ne sont pas avares de leurs effets et de leur musique tonitruante pour doper le moindre événement, même le plus petit. La mise en scène est très "à l'américaine", un brin putassière, et on sent bien qu'avec un gars plus sobre, pour ne pas dire plus honnête, on serait moins épaté par ces personnages incroyables. Mais tout de même : on assiste bouche bée à cette lente descente aux enfers de Joe Exotic, qui a le don de prendre toujours les mauvaises décisions, qui traite l'amour et l'amitié en choses secondaires, qui est prêt à tout, vraiment tout, pour garder son petit empire miteux. La somme de gusses impliqués finalement dans sa chute est incroyable, et tous sont mafieux, criminels, barrés. A travers la série, on entrevoit une certaine catégorie de la population américaine, puérile, immature, stupide, et le pire est que celle-ci semble bien finalement diriger le pays : les scènes où Joe se présente aux élections valent leur pesant de connerie humaine, tout comme celles où on voit ces gros mecs tatoués rigoler bêtement devant un bébé tigre. Le trafic d'animaux sauvages est traité ici à travers une tragédie à ciel ouvert, une histoire d'egos démesurés et de rancune, mêlée à de sombres escroqueries et à des histoires de fric : le cocktail est explosif. Et au final, les vraies victimes du truc, plus que Joe qui croupit en prison, plus que ces gars suicidés, virés sans ménagement, croqués par des fauves ou éjectés d'histoires d'amour, ce sont les animaux, guère à la fête dans la série. Utilisés sans vergogne par ces soit-disant défenseurs de leur cause pour assouvir leur mégalomanie, ils regardent tout ça avec une tristesse qui transparaît à l'écran. Malgré ça, pour peu qu'on soit doués d'une certaine dose de cynisme, on se tape sur les cuisses devant cette bande de crétins (dangereux, pourtant) complètement improbables et irrécupérables. A voir pour le croire.

1136_capture_decran_2020-04-06_a_08

Commentaires
Derniers commentaires