Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
1 janvier 2020

Transit (2018) de Christian Petzold

vlcsnap-2020-01-02-12h46m56s501

Voilà une oeuvre de Petzold plutôt maline : en transposant à notre époque un bouquin qui se déroule à l’origine durant la seconde guerre mondiale (une chasse aux allemands réfractaires en France occupée) et en conservant la trame principale, il parvient à mettre à faire ressentir ce que peut subir toute personne considérée comme personna non grata sur un territoire étranger - comme, allez, par exemple, au hasard un migrant, qui se retrouvera toujours, par la force des choses, éternellement en transit... Cet aspect-là sous-jacent du film, Petzold n'a pas besoin de l'expliciter tant il finit par être évident : en collant aux basques de son héros Georg (Franz Rogowski, une véritable force de caractère sous des allures dociles), en nous montrant toutes les difficultés auxquelles il doit faire face pour survivre (traque des flics, chienlit administrative, suspicion, peur, doutes...), on devine parfaitement le parcours du combattant que doit affronter tout individu qui débarque sur un territoire où on ne l'attend pas, où l'on se passerait volontiers de lui... Derrière cet aspect "thrilleresque" (la fuite de Georg de Paris à Marseille, la mort mystérieuse d'un écrivain, sa subtilisation d'identité (malgré lui) pour essayer de partir en des terres moins hostiles) qui est relativement bien mené, il y a ce terrible constat qui s'impose : Georg, qui tente de nouer des liens de sympathie, d'amour, avec son entourage, se voit systématiquement refoulé, rejeté, trompé, abandonné... Comme si cette fuite en avant, ce besoin d'échapper constamment à l'ennemi défaisait dans sa vie quotidienne toute possibilité d'avoir une vie normale, des émotions normales, des sentiments normaux... Malgré toute sa bonne volonté, sa gentillesse, sa patience, Georg se retrouve en plusieurs occasions comme deux ronds de flan. Il y a non seulement aucun répit pour une bête traquée mais cette pierre qui roule ne peut désormais tisser aucun lien profond avec ses frères humains. Une double peine en quelque sorte, résolument tragique.

vlcsnap-2020-01-02-12h47m58s408

Petzold, même s'il fait résonner ici ou là deux trois sirène de police et met en scène quelques bandes de policiers en tenue d'aparat organisant leur chasse à courre urbaine, se concentre surtout sur le visage de son personnage principale sur lequel passe, telles des ombres, toute un palette d'émotion ; si Georg est plutôt de nature optimiste, n'est en rien passif face au sort qui s'abat sur lui, ce poids devient tellement pesant qu'il finit par éteindre toute lumière dans ses yeux, par lui faire perdre tout espoir... Ce changement d'identité, finalement, lui ferme plus de portes qu'elle lui en ouvre, comme s'il se retrouvait lui-même en transit dans la peau d'un autre... sans pouvoir en tirer aucun bénéfice "humain". Intrigant et joliment mené, ce Petzold continue de trousser des petites œuvres plutôt finaudes.

vlcsnap-2020-01-02-12h48m12s472

Commentaires
Derniers commentaires