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Shangols
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14 mars 2015

Dialogues d'Ombres de Jean-Marie Straub - 2013

V13dialogue02

Aaaaaaah le retour de Straub, ça faisait longtemps sur ce blog. Nouvelle plongée en aridité, donc, et disons que si ce n'est pas complètement agréable, c'est pas non plus plaisant. Mais il faut ce qu'il faut si nous voulons boucler l'odyssée la plus exigente de Shangols. Pour cette fois, la douleur ne dure qu'une vingtaine de minutes, c'est déjà ça. Et la douleur se teinte d'une pointe d'intérêt, ne le nions pas. Toujours comme ça avec Straub : c'est pas un bon moment, mais il en reste toujours quelque chose de beau finalement. Bien : ce film-là est consacré à une nouvelle de Bernanos, dialogue entre deux amants potentiels qui se tournent autour, se refusent, s'acceptent, se jalousent, se fritent puis se réconcilient. Dialogue que l'on sent passionné, sanguin, à la fois empreint de souffrance et de lyrisme. Pour le faire entendre "au mieux", Straub choisit, comme d'hab, la solution la plus radicale : deux plans parallèles. L'un sur l'homme, cadré tout en bas de l'écran et excentré, avec au-dessus de lui un arbre immense ; l'autre sur la femme, cadrée très bas et excentrée, avec derrière elle une belle profondeur de champ, rivière et cheval paissant compris. Les deux comédiens envoient leur texte façon "Straub" ("oh MON Amieuu QUE NE Puis-jE vous vOIIIIr sans PLEUrer mes larmeu ZaMEreu"), dans une sorte de "chorégraphie" fixe, tout en montage au taquet, qui peut vous pousser éventuellement jusqu'à l'hilarité mais peut aussi vous plonger dans un curieux état, une sorte de transe autour du texte vraiment prenante.

V13dialogue01

Comme toujours, c'est rythmé au millimètre dans la longueur des plans, comme toujours c'est parfaitement impossible tant c'est culotté et sans concession, et comme d'habitude on en ressort avec plein d'idées en tête. Notamment celle que là se tient tout le cinéma, finalement : un texte dans un territoire (notion pas si éloignée du western), un cadre, un "temps", et les mille variations de la nature à l'écran. Chez Straub, un cours d'eau qui coule, le vent dans les feuilles ou une mèche de cheveu qui tremble, ce sont des évènements aussi importants qu'une invasion de tyranosaures chez d'autres. Alors bien sûr que c'est assez chiant si on attend autre chose ; mais ça peut aussi suffire largement à notre cerveau. Et quand, dans un dernier plan le gars réunit ses deux acteurs (et on se rend compte à ce moment-là que depuis le début ils sont assis côte à côté), on s'aperçoit aussi de tout ce que ce cinéma là a de théorique dans le bon sens du terme : abolir, ou plutôt réinventer le champ/contre-champ, c'est quand même pas rien. Straub, délicieuse douleur, sacerdoce bandant, je dis respect.

Tout Straub et tout Huillet, ô douleur : cliquez

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