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Shangols
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9 novembre 2022

Face-à-face (Ansikte mot ansikte) (1976) d'Ingmar Bergman

Femme au bord de la crise de nerf, version suédoise et, qui plus est, bergmanesque : c'est pas le genre de truc à vous arracher un sourire ou à vous tordre de rire. Vous n'avez pas la patate, vous gardez un sale souvenir de votre enfance, votre mari et vos enfants vous ennuient, vous regardez l'armoire à pharmacie de travers ? Ce film n'est définitivement pas pour vous et vous feriez mieux de passer votre chemin en courant. Bergman a le don pour vous plomber une journée, c'est ce qui fait résolument toute sa force.

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La chtite Liv Ullmann, psychiatre de son état, retourne vivre pour un temps chez ses grands-parents alors que son mari est parti pour deux mois aux Etats-Unis faire une tournée de conférence. On voit bien qu'elle a po l'air d'avoir le moral, nan, vraiment pas la péchouille, le regard un poil fuyant pour répondre aux injonctions de la grand-mère, et rien que de s'imaginer réhabiter sous le même toit que ses parents on la comprend. Mais on sent qu'il y a même plus que ça : qu'elle croise dans les escaliers le regard mortifère d'une vieille femme, regard qui réapparaît dans ses rêves, dans ses visions, et un frisson la parcourt (j'ai eu le même, remarquez, fout les chocotte c'te vieille avec sa pupille de corbeau), qu'une mémère lui parle de ses désirs sexuels et on la sent fébrile, sur la corde, qu'on la viole ou tout du moins qu'on essaie (un Bergman hardos) et elle reste sèche comme un cactus suédois (la preuve que cette plante n'existe point confirme bien mon propos), qu'un type barbu flirte avec elle et elle te le remballe sa mère que j'avais honte pour lui... On la sent sur le fil du rasoir, pas plus heureuse qu'un Chinois en vacances, et cette boîte de comprimés qui traîne, elle va te l'avaler gellule par gellule que cela m'a foutu mal au ventre rien que d'assister à cette scène filmée dans sa longueur. Entre la vie et la mort, elle se retrouve victime d'étranges rêves qui révèlent peu à peu toutes ses angoisses au plus profond d'elle, tout ce qui la ronge depuis des années. Au réveil, lorsqu'elle reprendra peu à peu ses esprits, elle livrera non seulement quelques éléments de son passé (la mort de ses parents et de certains de ses proches, sa frigidité,... c'est la fête youpla !) mais surtout elle se lancera dans une diatribe contre son éducation qui m'a toujours po fait retomber les poils ; Liv Ullmann se lance dans une imitation de sa grand-mère lui dictant, petite fille, ses règles, tout ressort d'un coup, face caméra et putain, émotionnellement, c'est comme se faire assommer par une poêle. Une séquence qui vous coupe les deux pattes, littéralement.

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Une véritable "handicapée émotionnelle", c'est ainsi qu'elle finit par se définir, le barbu à ses côtés acquiesce et on sent qu'ils seraient prêts, tous les deux, à coller cette étiquette à la plupart de leurs semblables ayant abandonné toute foi en Dieu (presque tout le monde quoi, on est d'accord). Cette plongée dans les tourments, les peurs de cette femme qui vire à la crise existentielle est au final assez impressionnante tant l'on sent un trouble profond l'étreindre, un doute terrible l'habiter (devait pas se marrer tous les jours Ingmar, diable): sa véritable crise de nerfs quand elle passe des rires aux larmes est proprement estomaquante. Même si l'ultime note sur la fin est un poil plus optimiste ("Quand on a que l'amouuuur..."), ce n'est pas le genre de films que vous aimeriez offrir à vos petits-neveux (à la limite à votre belle-soeur mais vraiment pour l'enfoncer). Pas un film donc vraiment olé-olé, mais qui bizarrement passe super vite (je dois pas être au mieux remarquez en ce moment...) sûrement grâce au jeu totalement habité de la Liv - extraordinaire, c'est le mot - et au travail d'orfèvre, à la caméra, du merveilleux Sven Nykvist qui suit au millimètre chaque mouvement du visage de cette femme (pas un manchot le gars, je vous prie de me croire). Un face-à-face avec soi-même qui fout en tout cas bien les boules... Bon allez, si on se tapait un ptit Pierre Richard après ça ?    (Shang - 01/02/09)

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Ah bon sang, c'est pas la période que je préfère chez Bergman. Moi qui lève toujours un sourcil dès qu'un film a tendance à se vautrer un peu trop dans le psychologique, je me suis foulé le front ici. On est en plein dans le surexplicatif de l'inconscient propre au cinéma bourgeois de l'époque. Au programme donc : dialogues signifiants sur le ça, symbolique des rêves, ambiguïté des caractères (qui est fou ? qui est le médecin de l'autre ?), crises de nerfs filmées dans la longueurs, actes manqués et traumas d'enfance, suicides ratés et non-dits, frustration et focalisations sexuelles, traumas prenant la forme d'un noir fantôme, obsession du viol, enfin toute la panoplie du petit Freud illustré mise ici dans un catalogue sérieux comme un pape malade. Moi, ça me tombe des yeux, que voulez-vous... Je l'aime, Bergman, quand il cache ces motifs psy dans un film formellement génial (Persona) ou dans un scénario particulièrement bon (Le Silence) ; pas quand il se complait ainsi à fouiller dans la tête de son actrice (qui m'a bien agacé, moi, pour le coup) et à en ressortir forcément avec les pires torsions de son esprit (quand on est cultivé, n'est-ce pas, on est forcément psychiquement malade). Ce cloaque psy déteint sur la mise en scène, que j'ai trouvée très datée, avec ses couleurs cacadois et ses zooms acrobatiques, avec ses scènes systématiquement trop longues et ses excès de comédienne. Parfois, bien sûr, c'est quand même Bergman, quelques plans sont inquiétants ou juste très beaux ; parfois on sent bien que c'est intelligent et assez brillant : quand le film joue sur l'ambivalence des personnages, quand on n'arrive plus à décider si on est dans une scène fantasmée ou dans la réalité, quand sur une expression de visage ou une phrase à double-sens on se retrouve plongé dans une névrose, dans une folie. Mais ces moments sont beaucoup trop rares au milieu d'un gloubi-boulga très indigeste d'étudiant en psycho deuxième cycle. Très chiant, pour moi.   (Gols - 09/11/22)

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l'odyssée bergmaneuse est là

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