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Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
9 novembre 2022

Mademoiselle Ogin (Ogin-sama) (1962) de Kinuyo Tanaka

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Ah mais quelle petite merveille, again, comme dirait mon gars Gols, que ce dernier film de Kinuyo Tanaka... en tant que réalisatrice... Nous terminons cette mini-odyssée de six films (presque vus dans l'ordre, tiens, c'est pas si courant) avec cette petite perle mélodramatique de cette immense réalisatrice-actrice nippone. Rendons hommage tout d'abord à la beauté rutilante, chatoyante, mirobolante de cette version rénovée en 2021 qui rend particulièrement justice aux couleurs chaudes, en particulier ce bleu-nuit profond... Ensuite que dire si ce n'est que c'est le film parfait pour fondre en larmes au bout de la nuit. On a là, ma bonne dame, tout ce qui peut venir contrarier un amour... Une jeune femme (délicieuse Ineko Arima as Ogin) est raide dingue de son initiateur au catholicisme Ukon (on ne présente plus Tatsuya Nakadai, l'un de mes grands acteurs nippons préférés, acteur doté de ce regard si particulier qu'il hypnotiserait en un tour d'oeil un caillou). Mais bon, en ce 16ème siècle, le catholicisme est vu, déjà, d'un mauvais oeil par des dirigeants qui aimeraient réduire son emprise sur le peuple. Un contexte guère favorable religieusement parlant, mais guère plus joyeux, a y regarder de près, au niveau sentimental : Ukon est marié et cela ne laisse que peu d'ouverture à Ogin... Elle remet quasiment sa vie entre ses mains, lorsqu'elle lui dit que, pour toute demande de mariage reçue, elle lui demandera son avis - espérant que le gars lui dise de rester chaste, de se dévouer à Marie, etc... Mais lorsqu'un marchand haut-placé demande la main d'Ogin, Ukon l'empresse d'accepter... Elle est un peu déboussolée, accepte bon an mal an ce conseil, et advienne que pourra... On la retrouve deux ans plus tard auprès de ce marchand lui-même un brin amer : elle se dévoue certes à son travail de femme d'entrepreneur mais ne s'offre point à lui... Ogin finit même par demander le divorce et l'obtient... Mais c'est le début du véritable marasme : alors même qu'Ogin et Ukon (veuf, enfin) se rapprochent, différentes menaces planent sur eux : un haut responsable a des vues sur Ogin (qui le jette propre) et les catholiques (dont Ukon est un incontournable représentant) sont de plus en plus victimes d'ostracisme... Comment nous deux amants potentiels pourront gérer cette tension...

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On est, disais-je, charmer, par la beauté des couleurs, des décors, des cadres, on l'est aussi tout autant par ces acteurs : ce couple-phare bien entendu, mais aussi la servante d'Ogin (positive Mieko Takamine toujours ardente défenseuse de sa maîtresse) ou le père d'Ogin (ce bon vieux Ganjirô Nakamura). Ce dernier est un des derniers grands-maîtres de la cérémonie du thé, une cérémonie du thé qui va jouer un rôle clé dans l'histoire ; alors même que Ganjirô prône les valeurs d’accueil et de simplicité de la chose, il va être en butte à l'utilisation qu'en fait le mari de sa fille (utiliser le service du thé pour son simple profit, pour corrompre de futurs contrebandiers notamment) ou encore le ponte du lieu qui veut dédier un palais en or à cet art (alors même que les paysans crèvent la dalle)... Deux façon de dévoyer cet art qui sont autant de marqueur de la décadence de ce temps... Dans ce contexte ardu, on se doute que les amours d'Ogin et d'Ukon auront bien du mal à éclore... Alors même que plusieurs scènes se teintent soudainement d'une ombre (des jeux de lumières proprement fantastiques et d'une beauté sans nom... cette soudaine noirceur, comme un nuage qui passerait miraculeusement sur tout le set, est proprement remarquable), on sent que la tristesse et la déception s'emparent peu à peu de nos personnages principaux... Des personnages qui, devant tant de haine, devront prendre des mesures pour le moins radicales... Le final,  toute proportion gardée mais tout de même, m'a fait sentir la même émotion terrible qu'il y a dans le final sublime de L'Impératrice Yang Kwei-Fei... Cette fatalité, cette acceptation calme de ce destin, cette ambiance à la fois morbide et terriblement apaisée... Ce sont, pesons nos mots, quelques dernières minutes de haute volée qui viennent conclure de toute beauté ce parcours cinématographique féminin proprement unique. Je conseille tout.

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