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Shangols
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30 mars 2022

Au Fil de l'Eau (House by the River) (1950) de Fritz Lang

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Y'a t-il un meurtrier qui sommeille en chacun de nous ? Bon moi je pense pas, mais j'ai jamais essayé faut dire. Une intrigue très resserrée en tout cas qui prend pour point de départ un petit écrivain en panne d'inspiration qui en pince tout d'un coup pour sa jeune bonne. Sa femme est en visite chez des amis et quand la bonne se plaint que sa douche n'a pas été réparée, l'homme lui propose de la prendre dans sa salle de bain. Aussitôt, une petite lumière perverse s'allume au fond de son regard, qui n'augure rien de bon : la lumière qui s'allume dans la salle de bain, l'eau qui s'écoule de la baignoire et qu'il entend couler dans les canalisations extérieures, un petit verre de scotch et voilà notre homme bien entreprenant alors que la jeune fille descend les escaliers... Mais bon, c'est comme toujours quand on a pas de bol, la fille résiste, on s'énerve, elle crie, on a peur, alors forcément on l'étrangle (tout le monde n'a pas la chance de se prendre une claque et d'en rester là...) Et voilà notre homme avec un cadavre sur les bras...

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"Ce n'est pas de la rivière que viennent les mauvaises choses, uniquement des hommes" disait l'écrivain en ouverture du film à la femme qui se plaignait de voir flotter n'importe quoi sur ces eaux troubles. Ben ouais, le pire c'est que notre homme va non seulement compromettre son frère pour faire disparaître le corps (après l'avoir supplié bien bas et raconté un mensonge bien gros) mais va également par la suite laisser le doute planer sur le fait que c'est peut-être lui, his brother himself, le vrai coupable. D'autant que le corps jeté à la rivière ne tarde pas à remonter à la surface à mesure que l'écrivain l'enfouit dans sa conscience (superbe scène de nuit où il part comme un fou à la recherche du cadavre qui ne cesse de le fuir dans le courant); il va même jusqu'à se servir de sa mésaventure dans son prochain roman, pensant qu'un bon écrivain doit savoir de quoi il parle (elle a dû en tuer des gens cette turpide Agatha Christie...). Son machiavélisme finit par lui faire prendre un sentier de plus en plus dangereux, un terrain glissant et boueux dont il pourrait être la propre victime (mais je dis rien).

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Un Lang d'une belle noirceur (le noir de l'image a tendance à déteindre sur le blanc) sur un scénario finalement très linéaire. Comment un petit geste fatal (lui sert à peine le kiki, faut dire, à la bonne) peut faire basculer un homme en une seconde (surtout si le type n'était déjà apparemment pas des plus sympathoches). Seulement si l'homme ne se noie à aucun moment dans la mauvaise conscience (le soir même il danse la carmagnole avec des rombières sous les yeux hallucinés de son frère encore sous le choc), il devrait savoir depuis longtemps que le crime ne paie pas : si le bras de la justice est un peu court, l'hallucination qu'il aura dans un moment de terreur - sublime photo ci-dessous - finira par le faire chuter bien bas (mais je dis rien). Du très bon Fritz (qui utilise à merveille les plongées et contre-plongées), propre et efficace.   (Shang - 25/11/07)

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Je ne suis pas un langien invétéré, mais je dois reconnaître que j'ai moi aussi beaucoup aimé ce House by the River classique et bien noir. Shang a tout dit des qualités de la chose, auxquelles j'ajouterais toutefois, on ne change pas un Gols énamouré, quelques inspirations hitchcockiennes dans le déroulement du meurtre notamment, avec cette scène obsessionnelle, mi-désir mi-répulsion, mi-sexe mi-mort, qui se répète deux fois : une femme qui descend un escalier, plan obsessionnel sur ses jambes, et on sent déjà que cette image va nouer le drame. Je voudrais pas faire le malin, mais ce plan pourrait représenter à lui seul toute la puissance du cinéma. Hitchcock refait très souvent surface dans cette macabre histoire, où les morts remontent à la surface tels des souvenirs ineffaçables, où on est obligé de tuer encore et toujours pour effacer les traces du crime originel, et où les fantômes finissent par revenir eux-mêmes chercher les coupables pour en finir (le plan vanté par Shang, effectivement sublime). Si les acteurs ne sont pas géniaux (exception faite pour Lee Bowman, excellent dans son rôle d'handicapé bouffé par son frère), si à l'intérieur du film certaines séquences apparaissent un peu transparentes (la faute à une écriture un peu poussive en-dehors des grands moments de la trame, lors de la scène du procès entre autres), si on voit souvent ce que Hitch aurait fait de certains détails (la voisine trop curieuse, le sac maléfique qui échappe toujours au meurtrier) (mais ok j'arrête avec Hitch, je revois ses films en ce moment, je suis obsédé), il faut reconnaître que le film est doté d'une puissance visuelle impressionnante due en partie à ce splendide "noir et noir" de l'image, à la beauté des décors et des costumes, et à l'invention spectaculaire de Lang dans les placements de caméra. C'est un festival de plongées vertigineuses et de contre-plongées non moindres, de profondeurs de champs longuissimes et de compositions de cadres impeccables, le tout soutenu par un montage génialement discret. Un grand moment, voui voui.   (Gols - 30/03/22)

Sans titre

Jeux de Lang ici

Commentaires
B
Pffffff… pourtant, on sait tous pertinemment, au fond de nous, que Hitch fait des films pour les (grands) enfants alors que Lang fait des films pour les adultes ! <br /> <br /> Non ? 😜
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P
Un beau Lang dans sa veine hitchcockienne ...
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