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Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
5 décembre 2023

Simple comme Sylvain (2023) de Monia Chokri

"- Kevin, il adooore faire le (sic) party, lui, ça doit être son côté masculin !
- Et c'est quoi son côté féminin ?
- Hum (long temps de réflexion) Ah ben il adooore vraiment ça, hein, s'faire mettre un doigt dans l'cuul !"

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Ah beauté et poésie cosmique de la langue d'Hubert Reeves ! Nous voilà donc chez nos amis canadiens francophones qui semblent bien avoir les mêmes problèmes que nous au niveau de l'inconstance des sentiments amoureux - mais ils restent plus fort dans la connaissance des ours, c'est vrai. Soit donc un couple bien sous tout rapport, ensemble depuis une dizaine d'années, sans enfant, encore, deux intellectuels (elle donne des cours à la fac pour séniors en attendant un poste ailleurs - sa spécialité : l'amour vu par les philosophes ; lui, je ne sais plus), qui font chambre à part, certes, mais surtout pour avoir leur petit confort perso... C'est un peu tiède au niveau love (physique) mais ils se montrent plutôt complices... On pense que notre gars va être malgré tout attiré par une petite française qui débarque dans leur cercle d'amis mais... c'est elle qui craque pour l'entrepreneur au physique de bucheron censé rénover leur chalet... Un amour physique, pour le coup, fusionnel, qui semble ne pas laisser, au quotidien, les deux nouveaux amants indifférents... Bien qu'issus de milieux différents (il est plutôt dans le bois, lui, un manuel quoi, ses connaissances littéraires s'arrêtant à la lecture d'une étiquette de whisky ou aux chansons de Michel Sardou), nos tourtereaux paraissent ne plus pouvoir se passer l'un de l'autre ; et ce qui avait des allures de simple escapade amoureuse au départ commence à prendre une autre tournure... Elle ne pense plus qu'à lui et semble prête à faire le grand saut... L'amour est toujours plus vert ailleurs, oui, surtout quand le body tourne à plein tube, tabernacle, mais cette attirance physique va-t-elle combler ces petites (moyennes, grandes ?) différences d'éducation et de culture ? A voir.

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On rit, forcément, toujours un peu bêtement d'ailleurs, devant ces tournures de phrase idiomatiques (le bucheron, un spécialiste de l'expression imagée) ou ces sujets de discussion qui partent en vrille (l'homme et son pouvoir de destruction, belle petite mise en bouche en ouverture du film). L'esprit est allègre et bon enfant jusqu'à ce que notre héroïne retrouve un second souffle dans les bras de notre homme barbu à chemise à carreaux (une belle bête, comme on dit chez nous) et pense, sérieusement, à se lancer dans une autre aventure . Elle refait l'amour comme à vingt ans, en mieux, et cette passion physique semble bien prendre le pas sur tout... Il faut passer par l'Annonce au Compagnon (chose jamais facile qui flirte toujours avec le pathétique - c'est jamais gai, une fin...), la Rencontre de la nouvelle Famille (le frère bourrin, la mère alcoolique, les chieurs de gamins - les premiers doutes qu'on balaie d'un claquement de paupière), la Présentation du nouvelle homme aux Amis (la partie la plus ardue, surtout quand il commence à déraper sur la peine de mort ou sur le fait que, des arabes, hein, il y en a des biens, non ?). Autant d'obstacles, après les parties de baise chaudes comme la braise et les longues balades dans les bois qui réchauffent le cœur, qui peuvent refroidir son homme... ou sa femme. Les dialogues sont de bonne tenue, les personnages ont suffisamment de poids et on suit  cette petite histoire passionnelle (ça faisait longtemps d'ailleurs... plus tellement d'actualité, la passion... ) roméoetjuliettesque d'un petit œil brillant et amusé. On voit bien que notre barbu est un peu mal dégrossi mais on espère que sa douce va savoir aiguiser quelque peu son esprit. Il y a des hauts, des bas, et on ne sait jamais trop sur quel côté de la pièce le film va finir par tomber. Belle petite comédie romantique joliment rythmée qui démontre que l'ami Bourdieu a encore de beaux jours devant lui. Sympa comme Sylvain, quoi...  (Shang - 23/11/23)

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J'ai pour ma part cordialement détesté ce film. Sous prétexte de comédie acide, et donc de caricature, Chokri se vautre avec complaisance et supériorité dans tous les clichés sociaux qu'elle a pu récupérer ici et là. La comédienne/réalisatrice a été à bonne école, n'est-ce-pas, puisqu'elle a bossé pour Xavier Dolan ; mais ça n'excuse pas tout. Donc : dans le monde, il y a les gens cultivés, qui écoutent de la musique contemporaine, connaissent Damien Hirsch et le nom du président de la Lituanie, boivent des vins raffinés, sont tolérants envers les homos, et baisent comme des patates ; et puis il y a les prolos, qui adorent Sardou, croient aux complots, parlent très fort, sont pour la peine de mort et baisent comme des dieux (ce qu'on appelle le bon sauvage). Et entre les deux, il n'y a rien, à part notre Sophia qui vient des bourges mais tombe amoureuse d'un prolo. Je sais, on est dans une comédie, il faut faire dans les clichés ; mais à ce point de schématisme, on frôle quand même la bêtise. Tous les comédiens obéissent donc à ces connes injonctions de classe, balancées par une réalisatrice dont on ne met pas longtemps à deviner de quel côté de la barrière elle est née, et du coup ça ne manque pas : ils jouent comme des cochons. On se croirait dans la pire comédie italienne vulgaire avec ce jeu poussé dans ses pires retranchements : les bourges parlent avec un accent pointu, les prolos sont cons comme comme des pneus, et le public peut tranquillement rentrer chez lui avec l'impression d'avoir été tolérant avec les deux camps, les deux étant traités de façon aussi grossière l'un que l'autre. Comme si ce racisme larvé ne suffisait pas, Chokri souligne encore ses références années 80 par une mise en scène qui multiplie les clins d’œil aux rom-coms les plus pétées : zooms extravagants, musiques romantiques à deux balles, situations de théâtre de boulevard, fines allusions à Julia Roberts ou à Bridget Jones. On va franchement d'effroi en effroi en voyant ce jeu de massacre hautain et méprisante envers ses personnages (tous idiots à leur manière, tous profondément détestables), très gêné de cette vision de classe qu'on pensait enterrée à jamais. De la sombre daube.   (Gols - 05/12/23)

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