Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
10 mai 2010

Les Contrebandiers de Moonfleet (Moonfleet) (1955) de Fritz Lang

vlcsnap_1298355

L'ami Gols, lors de notre dernière discussion skypesque, n'avait pas l'air d'avoir gardé un très grand souvenir de Moonfleet, et le problème c'est que je ne peux pas vraiment lui donner tort. Si la complicité qui s'établit entre le jeune Mohune et ce Lord félon Jeremy Fox (Stewart Granger qui serre la mâchoire pour se donner l'air d'un super méchant mais n'y parvient pas toujours) constitue le gros temps fort du film, on est en revanche un peu déçu, de la part de Lang, dans les scènes d'action ou dans cette fameuse recherche "au trésor" : beaucoup de capes mais malheureusement très peu d'épées (un combat légèrement déséquilibré entre notre Jeremy Fox, à l'épée, face à un type qui manie l'hallebarde comme moi le javelot : enfin un peu d'action mais qui tourne court); quant à l'énigme pour localiser le fameux bijou de famille, elle ferait passer le père Fouras pour un véritable génie. Certes les décors technicolor filmés en Cinémascope valent leur pesant de cacahuètes, la musique du gars Miklos Rosza est particulièrement enlevée, mais on reste un peu sur notre faim devant ce film qui semble plus convenir à un dimanche aprème de notre enfance pour rêver d'aventures extraordinaires. On se sent un peu couillon d'avoir passé l'âge.

vlcsnap_1299585

Fritz Lang nous gratifie d'une petite danse hispanisante avec une Liliane Montevecchi déchaînée sur la table qui nous rappelle que Dieu a bien fait de créer la femme; elle fout la honte à la compagne de Jeremy, la plantureuse Viveca Lindfors au regard cruellesque, et on pense s'acheminer vers un combat féminin de toute beauté. Lang décide de les abandonner en route - la Viveca ne réapparaissant que pour se venger de ce Jeremy peu fidèle qui cherche à se débarraser d'elle - et on regrette ces deux jolies figures expédiées en deux coups de cuiller à pot. Une troisième donzelle, Joan Greenwood, charmera plus tard notre héros (joli baiser dans le carrosse plein de perversité, sous les yeux mêmes du mari de la Joan, pour cacher et sauver la tête de Jeremy poursuivi par les gardes qui inspectent le dit carrosse), mais cette dernière ne va pas non plus faire long feu... On retrouve ce goût de Lang pour explorer les territoires en sous-sol (la scène dans le caveau puis celle dans le puits où notre jeune Mohune fait preuve de bravoure et d'intrépidité) tissant un lien en "profondeur" (mouais, je saute sur l'occase) entre notre jeunot jamais déméritant et ce Jeremy qui, sous ses faux airs de bandit sans foi ni loi, cache un petit coeur plein de tendresse. Cette association entre le jeune innocent et cette brute qui s'est enfermée dans sa carapace (ne semble jamais s'être vraiment remis de cette attaque par une meute de chiens) est touchante comme tout - bah si, un peu quand même -, notre Jeremy trouvant dans son sacrifice final une jolie petite rédemption. L'ensemble est, définitivement, magnifiquement filmé, mais on ne peut point dire non plus que ce récit "d'aventures" soit non plus trépidant de bout en bout. Je me range à l'impression générale de Gols, un poil déçu.

vlcsnap_1300406

Commentaires
S
Le con-trebandier, s'entend : pas même d'auto-insultes, on a dit.
Répondre
C
Info, vite en passant : <br /> <br /> Jeremy Fox n'existe pas dans le bouquin. Ou plutôt si. Il existe mais c'est un personnage archi-archi secondaire. Ce n'est absolument pas l'adulte qui recueille le jeune Mohune (qui porte le nom de Block si je me souviens bien).<br /> <br /> <br /> <br /> Je vois assez bien ce que tu veux évoquer par cette distanciation, Hamster. Je dirais que cette espèce d'abstraction existe tout de même chez Falkner , aussi. Stevenson, à mon sens, l'approchera surtout avec la maturité. <br /> <br /> Difficile de juger de l'évolution de l'écriture de Falkner, l'oeuvre n'est pas assez abondante (c'est le moins qu'on puisse dire) en regard de celle de ce bûcheron de Stevenson (symboliquement! Vu son physique et sa santé...). <br /> <br /> Bûcheron de la plume, évidemment. (Et poids plume , d'ailleurs). <br /> <br /> <br /> <br /> Pour conclure, j'avais, il y a longtemps, utilisé les deux citations suivantes. <br /> <br /> <br /> <br /> L'une tirée du roman: <br /> <br /> "Peut-être allais-je enfin être admis dans le monde des adultes... Ah, belle jeunesse, que nous sommes donc pressés de nous débarrasser de toi quand nous sommes enfants, et avec quelle nostalgie nous songeons à toi avant même d'avoir atteint la moitié de notre vie d'homme!"<br /> <br /> <br /> <br /> L'autre du film :<br /> <br /> "Les enfants sont des pestes. Je n'imagine pas que l'on puisse avoir seulement envie de vivre avec l'un d'eux". <br /> <br /> <br /> <br /> Pour ma part, j'apprécie les deux. <br /> <br /> Il me semble qu'elles sont assez explicites sur la différence de point de vue, et le regard accordé à et sur l'enfant par l'écrivain et le cinéaste. <br /> <br /> Néanmoins, la distance est bien là. <br /> <br /> <br /> <br /> A propos. Pas toussa. Je pars à la mer again ( et pas fini mon paquetot !)<br /> <br /> Hé oui, Shangols, le con descend dans le sud.
Répondre
H
L'honnêteté m'oblige à préciser que je ne l'ai pas lu le livre de Falkner : peut-être y trouve-t-on aussi ce mélange de romanesque « échevelé » et de style très tenu, typique de Stevenson — et de Lang.
Répondre
H
Sans vouloir pontifier, et quelle qu'aient été leurs relations autour des 'Bourreaux meurent aussi', je crois qu'il ne faut pas négliger le côté brechtien de Fritz Lang — pas le Brecht carnavalesque, mais le Brecht « distancié ». Tout ce qui vous apparaît décevant dans 'Moonfleet', je le mettrais pour ma part au compte de cette distanciation, une sorte de graphisme moral et visuel. La très belle scène du combat entre Jérémy Fox et l'homme à la hallebarde, ce n'est que cela : un dynamisme graphique, épuré. Rien à voir avec le grand spectacle du duel final de 'Scaramouche', trois ans plus tôt, avec le même Stewart Granger. Cette distanciation rapproche d'ailleurs plus le film de Stevenson que de John Meade Falkner, l'auteur du 'Maître de Ballantrae' m'apparaissant comme la véritable inspiration littéraire, en l'occurrence, du film de Lang. Chez Stevenson, ce sont les thèmes qui sont « romanesques », flamboyants, quand le style, lui, est extrêmement tenu : on pourrait en dire autant du 'Moonfleet' filmique, et d'une large part de l'œuvre languienne (le summum de cet oxymore artistique se trouvant peut-être dans le diptyque 'Le Tigre du Bengale' / 'Le Tombeau hindou').
Répondre
C
Deux barils valent mieux qu'un ! <br /> <br /> Le lot, sinon rien.
Répondre
Derniers commentaires