Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
16 septembre 2023

Vivre sa Vie de Jean-Luc Godard - 1962

mylifetoliveVivre sa Vie est assez étrange dans la carrière de Godard. Il appartient à cette série de portraits des années 60 (Une Femme est une femme, Une femme Mariée, Deux ou trois Choses...), mais cette fois-ci, c'est un film linéaire, qui raconte vraiment un destin, dans l'ordre, à travers des flashs et des impressions physiques : en l'occurrence, la vie de Karina, qui rêve de cinéma, tombe dans la prostitution, et se fait revendre par son mac.

Le personnage est superbe : une pute assumant de l'être, qui pleure au Jeanne d'Arc de Dreyer, philosophe sur les limites du langage avec un vieux littéraire, s'intéresse à Edgar Poe aussi bien qu'à la pluie parisienne, et considère l'amour comme une chose douce et belle. Quitte à me faire exploser par les doc_60godardiens de la première heure, je trouve Karina un peu "trop", on la sent trop consciente d'être filmée (surtout d'aussi près), un brin poseuse et volontairement belle (je trouve pas d'autres mots). Non, le film, quoiqu'on en dise, ne repose pas sur son talent, mais bel et bien sur celui de Godard lui-même. Sa distance par rapport aux choses, sa liberté de ton, ses digressions (on sent qu'il utilise son carnet de notes glanées par-ci par-là), ses inventions de mise en scène constantes et brillantissimes, font de Vivre sa Vie un bijou précieux, un de ces films où la sensibilité "personnelle" s'exprime totalement. Il réinvente constamment la technique du champ/contre-champ, filmant au cours des 12 chapitres du filmvivre des dialogues qui changent sans arrêt de points de vue. Un dialogue de dos, un dialogue avec des personnages cachés, un dialogue sous-titré, un dialogue silencieux... C'est totalement maîtrisé, et très sensible, très loin du JLG intello qu'on veut voir souvent. La musique de Legrand, simplissime et belle, vient appuyer ces mouvements de caméra lisses et sensuels. Et puis la vie est bel et bien là, à travers des pauses dans le temps magiques (la chanson de Ferrat, le film de Dreyer), Paris est là, l'amour est là. Ca ne tient à rien, franchement, c'est juste du cinéma. (Gols 28/06/06)


Quel plaisir de se faire un petit Godard au cinoche - le dernier (et le seul ?) que j'avais jamais vu devant être Le Mépris à la Cinémathèque française... quand elle était encore au Palais de Chaillot... Diable. Oui, le moins qu'on puisse dire, c'est que la caméra de Coutard sous la direction du Jean-Luc filme amoureusement de profil, de face, de dos, celle qui est devenue la nouvelle compagne de ce dernier. Je rejoins totalement l'ami Gols quand il évoque la façon dont Godard, explorant semble-t-il toutes les possibilités de son nouveau jouet cinématographique, se fait une gageure de ne jamais filmer de la même façon ces douze tableaux. Gols a évoqué la plupart des variations, j'avoue pour ma part une petite faiblesse pour cette scène où la Karina, gracile, autour d'un billard, se meut, danse, chante avec une insouciance absolue... Après toutes ses séquences de prostitution un peu répétitive, il semble que le film se mette d'ailleurs enfin à décoller, ce que viendra confirmer la magnifique scène (parfaite mise en abyme enamourée) avec la lecture du Portrait oval de Poe et la discussion soudainement philosophique avec le gars Brice Parain - qui semble bien le premier (et le dernier) à la prendre enfin au sérieux (je parle donc je pense donc je parle). Alors oui, si on peut se plaire à goûter les tentatives formelles de JLG, on est tout de même un peu en reste sur le fond, assez surpris (dans un premier temps) de voir Godard faire jouer à son amoureuse une prostituée (très pudique et très polie, ladite, certes) ; on ne peut s'empêcher de voir en cela, en creux, le petit côté éternellement caustique de Godard pour qui, vivre sa vie, faire du cinéma, jouer le jeu de la société revient finalement toujours plus ou moins, à un moment, à se prostituer - pour vouloir perdurer, il faut plaire, séduire, n'est-il point ? On plaînt quelque peu l'Anna-Nana d'avoir à se taper toute cette bande de types perdus et de finir sacrifiée sur le bitume, mais on se rassure quelque peu en se disant qu'il y a finalement, tout du long, dans ce regard porté et capté par son amoureux (ce regard caméra quand elle est dans le café, diable, j'en frémis encore) presque autant d'émotion et de passion que lorsque Dreyer enregistrait celui de sa Jeanne en émoi (sacré moment de cinéma, faut dire). Que du cinéma, oui, mais un jeu entre la caméra et la Karina qui émeut - still. (Shang 16/09/23)

5175936

God-Art, le culte : clique

Commentaires
Derniers commentaires