C'est du côté de la Hongrie que nous emmène Sigl pour cette histoire qui tient presque plus du conte horrifique que du film d'horreur classique. Il y est question d'un homme drapé de noir qui tue du petit nenfant la nuit... et d'une gamine, Laurin, dont on ne sait trop parfois si elle a des rêves ou de simples visions sur les passages à l'acte de cet homme... Le fait est que le récit part de toute façon plutôt mal pour notre Laurin puisqu'elle ne tarde pas à se retrouver un brin esseulée : un père marin aux abonnés absents, une mère que l'on retrouve au petit matin, noyée, après le meurtre d'un nouveau bambin, et une grand-mère vieillissante qui se doit de veiller sur elle alors même que la gamine est sujette à ses visions d'horreur - qui la réveillent la nuit mais personne n'est à son chevet... Est-ce que cela va saigner ? Pas forcément, puisqu'on se rend compte rapidement, que le gars Sigl semble plus adepte de la belle image que de la chose gore : l'on va flotter, au cours de ce film qui peut certes à tout moment re-basculer dans le crime, dans une ambiance relativement ouatée, les plans et les éclairages de Sigl étant souvent bien jolis et le monde, vu à travers le regard de cette jeune gamine, semblant quelque peu s'adoucir... On la suit à l'école avec ses quelques camarades (les perturbateurs, les gamins victimes) et ce nouvel instituteur qui la couve du regard... Pour le pire (pourrait-il s'agir du fameux monstre nocturne, ce revenant de l'armée ?) ou le meilleur (quelqu'un va-t-il enfin véritablement veiller sur elle ?) ?

Le rythme est lent, ma foi, mais l'on se fond avec un certain plaisir dans ces paysages d'eau, de champs, dans ces scènes champêtres, scolaires, aimanté par le regard relativement doux que la jeune fille pose sur son entourage, les choses, les bêtes ou les êtres... On sort quelque peu de sa torpeur (on commençait, il faut le dire, quelque peu à s'alanguir : il est bien joli ce village avec tous ces autochtones typiques, mais il ne se passe pas grand-chose non plus) lors de ce dernier quart-d'heure où l'on ne sait trop si notre petit chaperon rouge va se faire bouffer tout cru par le loup ou si ce petit chaperon, lucide jusqu'au bout, sera capable de faire face à ses cauchemars... C'est de la belle ouvrage, du travail de l'Est, quoi, un conte peuplé d'images fortes et de personnages ambigus, qui ne pêche sans doute que par une certaine mollesse un brin soporifique... Beau rêve éveillé à voir en bâillant.

Laurin (1989) de Robert Sigl

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