Fort de mes analyses géopolitiques récentes, je vais vous faire maintenant un exposé sur la guerre israélo-palestinienne. Bon, ok, comme j'ai peur d'offusquer le neutre Gols, je m'en abstiens, vous vous en sortez bien. Premier long métrage de Mai Masri (cinéaste dont je connais l'existence grâce à ma douce qui fut sa French coach en d’autre temps - j'aimerais autant que ça reste entre nous pour ne pas avoir d'ennui avec quiconque, merci), 3000 Nights évoque l'emprisonnement d'une femme palestinienne en Israël. Layal a-t-elle aidé volontairement un "terroriste" palestinien en l'aidant à fuir après le meurtre d'un soldat israélien ? On n'en saura franchement guère plus sur les détails de son arrestation, le fait est qu'elle écope de huit ans de prison. En bonus, elle apprend qu'elle est enceinte et son mari de lui apprendre dans la foulée qu'il part au Canada. Bref, c'est ce qu'on pourrait appeler une mauvaise période. Masri nous présente la vie tendue (prisonnières israéliennes et palestiniennes se côtoyant) de ces geôles locales où les matonnes ne sont pas du genre à avoir l'humour facile. Layal aura la possibilité d'avoir son fils pendant deux ans avant qu'on le lui reprenne. Alors qu'elle a la possibilité, en jouant les balances sur ses paires, d'avoir une remise de peine, Layal restera jusqu'au bout fidèle à elle-même : de la même façon qu'elle n'a pas enfoncé le "terroriste" israélien en disant qu'il l'avait menacée d'un couteau en tentant de s'enfuir, elle ne dénoncera jamais les petites libertés avec le règlement de ses paires. Surement victime d'une injustice, Layal fera ses huit ans en gardant la tête haute et en aidant au besoin ses camarades de geôle. Digne.

Digne, le film l'est, sur un sujet qui n'est pas le plus jouasse du monde. Masri évoque au passage le massacre de Sabra et Chatila (le film se déroule dans les années 80) et montre avant tout les conditions d'internement de ces prisonnières politiques palestiniennes jugées de façon on ne peut plus lapidaires. On comprend aisément le point de départ du film et le parti pris de la cinéaste - on ne reviendra pas sur cet aspect politique, voyez comme je marche dorénavant sur des œufs. Qu'en est-il du film, alors, en tant que tel ? Récit de la violence ordinaire (les femmes entre elles se rendent coup par coup, la Muriel Robin israélienne avec son oeil en moins fait franchement peur), du déchirement affectif (Layal n'a que peu de contact l'extérieur, si ce n’est parfois sa mère – son mari se fait plus que discret ; on lui enlève également son enfant après une tentative de chantage crapuleuse), de l'injustice (son avocate ne peut guère agir en sa faveur, une fois le jugement tombé). Un film de femmes entre elles qui illustre avec une certaine sobriété les combats de tous les instants pour ne pas se faire bouffer et les complicités qui se tissent malgré tout dans la douleur. C'est une œuvre honnête pour "dossier de l'écran" qui manque sans doute de contrepoint et qui contient sa petite dose de mélodrame obligée – sans lourdeur trop facile (l'enfant pris des bras de sa mère et la libération inattendue de certaines de ses femmes pour procéder à des échanges avec des prisonniers israéliens). Correct, sans transcendance cinématographique. Digne, oui.

3000 Nuits (3000 Layla) (2015) de Mai Masri

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