Exit Stallone de la franchise et quoiqu'on en pense (le type avait fini par avoir moins d'expression faciale que sa poupée de cire), c'est la première mauvaise nouvelle : même s'il n'était qu'accessoire, il apportait au film un fumet de vieux canapé en cuir usé jusqu'à la corde qui valait des points en terme de nostalgie surannée... Il est parti, oublié, même pas évoqué et Michael Jordan a pris les clés de la maison pour mettre en scène et déifier... Michael Jordan - on n'est jamais mieux servi que par soi-même... Un dernier combat, qu'il remporte haut les gants, un appart de dingue avec une femme qui croule sous les disques d'or et une gamine rêvée puisqu'elle est muette : bref, il a tout... Mais attention, son passé pourrait le rattraper : ce passé prend les traits d'un ami d'enfance (Jonathan Majors, une bonne gueule de l'emploi et du chien... c'est le seul peut-être à sortir un peu du lot) qu'il a lâché à un moment crucial de leurs vies d'ados... Il va se faire un devoir d'aider son pote, de lui donner une chance de combattre au plus haut niveau mais voilà, quand le type aura obtenu ce qu'il veut, il va chier dans les bottes de Creed. Et ça Creed, il aime pas - mais se venger à la force de ses poignets, il kiffe, reprend pour la peine l'entrainement (tiens, je vais tirer un avion avec les dents : cela fera une belle image) et... L'issue finale ferait-elle encore doute...? Non. Ce qui faisait le charme du premier Rocky voire du premier Creed, c'était ce petit côté touchant, voire "vainqueur du coeur" du loser... On est dorénavant dans le culte du héros, aussi irréprochable dans sa vie privée (honnête et friqué jusqu'à l'os) que dans sa vie professionnelle et sportive (il faut vaincre pour montrer qu'on a raison, qu'on est le meilleur, qu'on est parfait). Jordan, sottement, fait tourner la caméra autour de lui, se montre sous ses plus belles facettes, dans le rôle du type généreux, droit, et triomphant... Non seulement la mise en scène, pétante et clinquante, sonne creux, mais ce scénario dont on devine d'avance tous les rebondissements (il y en a deux, max) n'apporte absolument rien à ce personnage aussi remarquable qu'une toute petite pierre à côté d'un grand roc fissuré... Stallone ne veut pas voir le film et on aurait presque envie de lui claquer une tape dans le dos si on avait pas peur de le fracasser. Un Creed III pour les midinettes et les barbots... L'esprit du gars Balboa est définitivement tout déplumé.

Creed III (2023) de Michael B. Jordan

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