Un western avec Robert Hossein et Michèle Mercier ? On s'apprête à ricaner méchamment en matant ce film. 1h25 plus tard, on est tout honteux : voilà un excellent moment, vraiment honorable à tous les postes, et qui vous apporte votre dose de classicisme tout en ne déméritant pas vis-à-vis des westerns tardifs de l'époque, notamment côté Italie. Hossein, pris en flagrant délit d'admiration pour les grands films ricains d'il y a 15 ans, livre un hommage énamouré, certes pas complètement réussi, mais tout à fait respectable et même parfois très beau. Rira bien qui rira le dernier, on se dit.

Notons tout de suite ce qui achoppe : le scénario. Maigre, trop classique, déjà vu mille fois, il ne sert que de prétexte à ce film de mise en scène. C'est une bête histoire de vengeance d'une femme dont le mari a été pendu arbitrairement par une smala torve, les Rogers. Elle engage un mercenaire, mutique comme de bien entendu, qui va infiltrer le clan Rogers. Ça se complique inutilement après, avec un enterrement symbolique et l'enlèvement d'une jeune fille qui servira de monnaie d'échange. L'important est que tout ça se termine dans le sécheresse et le sang, dans une des seules scènes d'action du film. En effet, Hossein est avare en coups de feu, quand ils claquent ça dure une demi-seconde, et est beaucoup plus attentif aux ambiances. Le film semble exister en tant que scénario uniquement pour la réunion du couple de Angélique Marquise des Anges et d'ailleurs, si Hossein est plutôt sobre dans le rôle du cow-boy solitaire (curieuse démarche tout de même), Mercier en fait des caisses dans son statut de tragédienne. Ce n'est pas dans cette trame trop classique qu'il faut chercher la beauté de Une Corde, Un Colt.

Par contre, niveau technique, c'est super. Complètement en admiration devant les grands westerns du passé, Hossein soigne ses cadres et ses mouvements de caméra en orfèvre. Il y a là des angles de caméra très joliment pensés, notamment une utilisation de la profondeur de champ, du cadre dans le cadre (merci, John Ford) et du recadrage qui force le respect. On se croirait dans une version dégénérée d'un de ces vieux classiques de Boetticher ou de Mann. L'utilisation de sa ville-fantôme, décor complètement improbable, avec son saloon-casino désert, prolonge la solitude du personnage, et n'empêche jamais Hossein de lever les yeux pour contempler les superbes décors naturels, là aussi façon Ford. Son père, André Hossein, fabrique une musique elle aussi très classique, aves ses thèmes tour à tour tonitruants ou romantiques, et même si son fils ne trouve pas toujours la bonne place pour l'envoyer (l'arrivée de Mercier dans le saloon, soulignée par des violons lourdauds), elle n'est pas si loin, elle non plus, de tous les petits artisans américains. Hossein se permet même une scène aberrante, un repas filmé comme dans les westerns spaghetti, silencieux, tendu, qui multiplie les plans serrés... pour aboutir à une grosse farce de collégien stupide (un pot de moutarde piégé). C'est la seule scène humoristique du film, elle allège l'ensemble, mais dans le soin apporté à sa réalisation, elle est excellente et inattendue. Vraiment, le film est très agréable pour les yeux (et les oreilles, donc), rangez vos ricanements, et pour cette fois (et cette fois seulement), respects pour Hossein.

Welcome to New West

Une Corde, Un Colt de Robert Hossein - 1968

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