Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
OPHÜLS Marcel
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
14 décembre 2022

Les Nuits de Mashhad (Holy Spider) d'Ali Abbasi - 2022

Holy-Spider-Cannes-1450x800-c

Pas très à l'aise avec ce film, qui m'a bien intéressé d'un côté, mais qui me semble quand même un poil complaisant et lourd. Abbasi a du talent, une efficacité qui ne fait aucun doute, un sens de la narration bien en place, il a des idées et des acteurs remarquables ; mais il a aussi une façon de nous asséner ses images en ne nous laissant aucune marge de critique, et Les Nuits de Mashhad a tout du bulldozer en fin de compte, jouant assez putassièrement de son statut de "film politique critique du patriarcat et des accointances de pouvoir" alors qu'il est simplement un bon thriller d'action. Et encore, un bon... Il court bien derrière des modèles tout à fait dignes, la traque de ce serial-killer iranien dans une ville vouée à la gabegie peut rappeler les Taxi Driver ou autres Étrangleurs de Boston ; mais il n'a absolument pas le génie de la mise en scène de Scorsese ou de Fleischer.

3741073

On tombe pourtant dès le début dans l'enfer, raconté avec une crudité étonnante : une prostituée droguée erre à la recherche de clients, prodigue une vague pipe, se shoote copieusement, puis tombe sur un motard qui l'embarque et l'étrangle. Frontalité de ce qui est montré, âpreté du propos, rythme impeccable, sens de la surprise, cruauté de l'atmosphère : on s'attend à un film noir de chez noir. Et effectivement la suite sera une chute progressive dans l'enfer de l'Iran contemporain, construite autour de deux personnages. D'un côté, donc, cet homme assassin de prostituées, convaincu qu'il est investi de la mission divine de nettoyer la ville du vice, bon père de famille en apparence mais sadique sans pitié la nuit ; de l'autre une journaliste lancée à ses trousses, déterminée à mettre fin à ses agissements et effarée par la lenteur de l'enquête : y aurait-il une certaine complaisance de la police, qui trouverait cette "épuration" bien commode ? Envers et contre tout, elle va tout faire pour enfin mettre la main sur notre homme, au risque de sa vie, et au risque aussi de découvrir que l’État n'est pas tout blanc quand il s'agit d'étouffer des affaires de mœurs concernant des putes, et que la domination du patriarcat est encore bel et bien efficiente.

5972077

On le voit, Abbasi s'attaque à un gros poisson, et voudrait bien doubler son film d'action d'un vaste discours anti-système et critique envers son pays. Mais l'attaque est un peu trop lourdaude pour être vraiment convaincante : on cesse assez vite de croire dans cette solidarité de l’État envers un tueur, on lève franchement un sourcil dubitatif devant ces scènes appuyées où la journaliste est empêchée dans sa traque par des machistes dessinés à gros traits. Plutôt que de rester dans le suspense, genre où après tout il n'est pas si mauvais même s'il manque d'originalité, Abbasi voudrait bien faire un film définitif sur l'état de l'Iran aujourd'hui. Mais ça sent un peu l'opportunisme, le discours paraît peu sincère. Autant alors se contenter du polar, bien que là aussi il y ait à redire : complaisant dans les scènes de meurtre, assez fasciné visiblement par ce sadique, il regarde ses personnages avec froideur, sans empathie, sans émotion. C'est efficace, oui, et on suit sans problème ce thriller assez palpitant ; mais c'est aussi un peu putassier, comme certains "film de vengeance" américains des années 80, où on aime tout autant contempler les meurtres que l'exécution du meurtrier. Bourbeux, pour le moins, nonobstant son aspect spectaculaire.

5926837

Commentaires
Derniers commentaires
Cycles
Cycle Collection Criterion 1 2 3 4 5 6 7
Cycle Cinéma Japonais 1 2 3 4 5 6 7
Cycle Festival de Cannes 1 2
Cycle Western 1 2 3
 
 
Best of 70's      80's      90's      00's      10's
 
Ecrivains