Objectif Terre, Mission Apocalypse (Chikyû kogeki meirei : Gojira tai Gaigan) (1972) de Jun Fukuda
Douzième opus, comme le temps file, des aventures de Godzilla... Fukuda, honnête artisan, a la bonne idée de laisser tomber les petits héros nenfantins pour revenir à la base de la chose : du complot cosmique, de la maquette, du combat. Ce sont cette fois-ci des cafards qui décident d'envahir la terre, des cafards qui prennent tout de même forme humaine pour tromper l'adversaire. Prenant le prétexte d'un parc d'attraction (avec une tour géante de Godzilla - belle métaphore en passant du parc d'attraction, piège à con : nos jeunes promoteurs cafardeux disent que ce parc se pose comme un symbole de la paix alors que ces fumiers veulent purement et simplement détruire les êtres humains), nos petits hommes orange coiffés comme des Playmobils vont s'en servir comme base pour apporter le chaos. Leur principe de départ n'est pas complètement idiot en soi et prend aujourd'hui encore une belle résonance : vous avez pourri votre planète, disent-ils, laissez-nous la place (ils viennent d'une planète déjà pourrie par la pollution, c'est une vraie fatalité...). Ils font appel pour cela à deux créatures cosmiques, notre bon vieux monstres à trois tête, Ghidra, de tous les combats, et un nouveau venu, Gigan, dont les épines dorsales se transforment en scie circulaire - il infligera d'ailleurs, cette enflure, la première blessure de la série à Godzilla qui verra son sang jaillir...
Godzilla, parlons-en, n'est plus depuis longtemps ce monstre purement destructeur : il se pose désormais en véritable héros puisqu'il s'opposera, avec son pote Anguirus, à ces deux mastodontes aux ordres des Playmobils... Il est aidé par une poignée d'humains pugnaces (dont un baba cool, c'est la mode) dans son combat, l'armée mettant les moyens mais se montrant une nouvelle fois bien inefficace (faut-il y voir une autre critique sous-jacente ? Godzilla est un puits de contestation virulente...). L'apparition de l'armée, tout de même, nous permet d'apprécier les derniers modèles de maquettes, maquettes que l'on retrouve d'ailleurs toujours aussi soignées lors de la conception de ce parc godzillesque... L'histoire est chiante à mourir, on se rattrape avec ces petits bijoux à roulettes... Fukuda, après avoir fait semblant de tramer une intrigue cosmico-burlesque (avec une petite place faite à la bande-dessinée ; les monstres d'ailleurs s'expriment parfois avec des bulles... ! C'est d'un beau ridicule), se concentre surtout, disons-le, dans cette confrontation entre les monstres - avec les multiples explosions urbaines qu'ils provoquent... On se jette des pierres, on s'entaille, on se balance des coups de poings, on se prend des rayons laser dans la tronche, on se roule dans la poussière et vas-y, et tiens, jusqu'à ce que cela se transforme en véritable combat de catch - à supposer que les catcheurs puissent se balancer hors du ring en se prenant par la queue, ce qui n'aurait rien de surprenant en soi vu la subtilité du bazar... Un combat infini, donc, qui permet à Godzilla d'affirmer définitivement son statut de sauveur de la planète bleue... Il s'en repart tel Lucky Luke sur une chanson bien pourrave : il lui reste trois aventures à faire, il doit se reposer. Ça tombe plutôt bien, nous aussi... Pour les amateurs de combats et les fans de Playmobils orange.