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19 juillet 2023

Marx peut attendre (Marx può aspettare) (2021) de Marco Bellocchio

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Derrière ce titre intrigant se cache un bien joli documentaire de Bellochio sur son frère jumeau, Camillo, disparu à 29 ans, suicidé. Marco, entouré de ses proches, ses frères, ses sœurs, la sœur de l'ancienne copine de Camillo remonte le fil du temps et évoque ses différents souvenirs familiaux. Si ce suicide prit tout le monde de court et eut un impact évident sur la vie de chacun des membres de la famille, forcément (la madre en premier lieu mais également les brothers dont, bien sûr, Marco qui évoqua ce frère disparu notamment dans une de ses œuvres (Les Yeux, la Bouche), chacun parle ici avec une véritable sincérité et de façon "décomplexée" de ce frère à la trajectoire fulgurante. Il paraît assez vite évident que si Marco, cinéaste, et Piergiorgio l'aîné, surent tirer leur épingle du jeu dans cette Italie d'après-guerre, le gars Camillo eut un peu plus de mal à faire son trou. Un complexe qui semble l'avoir poursuivi jusqu'à cette journée fatidique. Mais ce qui est surtout intéressant dans ce portrait "a posteriori" c'est surtout de voir à quel point les versions divergent... Il y avait déjà eu, à la mort du père, deux versions des faits : celle, écrite par son épouse, où il reçut les derniers sacrements sans broncher et celle de différents témoins de la scène évoquant un rejet violent, de la part du père, de l'homme de religion... Une mère, très croyante, qui eut quelque peu tendance à garder pour la postérité la version qui l'arrangeait... De la même façon, on sent que chacun ne s'accorde pas vraiment autour des circonstances de ce suicide : une histoire de cœur, un sentiment d'oubli de la famille de la part des frères notamment, un accident idiot ? Chacun semble s'être tramé sa petite analyse et ce même si le dernier message laissé par Camillo avant de commettre l'irréparable (mais détruit depuis) semblait assez clair quant à ses intentions... Un petit arrangement avec les morts, en quelque sorte, pour tenter sûrement de ne pas vivre avec trop de poids sur la conscience... Marco Bellochio, en tout cas, en tentant de revenir sur le fil de cette vie, en "confessant" ses souvenirs auprès de ses proches mais également auprès d'un Père (qui analysait d'ailleurs déjà ses films comme des confessions - ce qui fait bien marrer le gars Marco, pas si porté que cela sur la religion lui-même) tente de s'approcher au plus près de ce frère dont il ne fut sans doute jamais très proche (dans les années 60, il semblait plus concerné par ses films, par les mouvements étudiants que par ce brother ; ce même brother qui eut d'ailleurs cette fameuse réplique quand le Marco évoquait les manifs sous influence marxistes : "Marx peut attendre", sous-entendu "j'ai des problèmes personnels autres"... Une réplique qui marqua Marco mais qui ne le rendit pas pour autant plus sensible à la dépression de son jumeau...). Doc sobre, joliment mis en musique, où chaque frère et sœur joue le jeu, face caméra, sans sentimentalisme exacerbé, mais avec toujours cette ombre du regret qui plane - ne pas avoir su comprendre cette profonde détresse, ne pas avoir été là pour empêcher cette mort... Marco face à sa vie, à ses manques, à ses tourments. Bel hommage, beau regard (bel occhio), tardif mais mieux vaut tard, hein.   (Shang - 15/10/22)

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Oui, moi je suis toujours un peu dubitatif face à ces docs qui ne semblent concerner que leur auteur, sa famille, son nombril et sa propre résilience (suivez mon regard également du côté du film de Charlotte Gainsbourg sur sa mère, encensé ces jours-ci). Effectivement réalisé avec soin, pas ennuyeux et joliment auto-dépréciatif, Marx peut attendre n'a rien à se reprocher. Sauf de n'exister que pour faire le point sur la mort de ce frère avec la famille du cinéaste, et du coup de nous concerner assez peu. Car jamais le film ne tente de lever les yeux et de nous inclure dans cette histoire. On regarde cette famille accuser le coup de leur indifférence, et si ça peut être intéressant effectivement, pour toutes les raisons énoncées par mon camarade, on peut aussi rester extérieur, jamais touché, jamais édifié, jamais instruit par le film. Pas de réflexion historique ou politique (ce que la signature de Bellocchio et le titre laissaient attendre), aucune possibilité de se projeter sur ce cas spécial, et même aucune occasion de trouver du style là-dedans : trop préoccupé par la véracité des sentiments qu'il filme et par l'hommage au frère, Bellocchio évite à tout prix de faire le malin ou de réfléchir à une quelconque forme. Du coup, on ne peut pas dire que ce soit anonyme, non, c'est trop bien fait pour ça ; mais c'est un peu bordélique, quoi, pas très réfléchi dans ce que ça raconte, un peu fait à la bonne franquette, sur un coin de table. Bon, allez, pas mal, et parfois intéressant. Pour plus de passion, voyons les autres films du maestro.   (Gols - 19/07/23)

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