Les bonnes Etoiles (Broker) (2022) de Hirokazu Kore-eda
Revoilà ce bon Kore-eda qui plante cette fois sa caméra en Corée pour une sorte de thriller familial très bon enfant. Au départ, des personnages forcément trop méchants : ils sont deux et ils travaillent dans une association où on récupère des bébés abandonnés ; nos deux compères trouvent rien de mieux que de faire disparaître les vidéos quand un bébé est déposé pour s'occuper personnellement de son sort... en le revendant. Pire, cette fois-ci, ils s'associent à la mère qui est revenue voir sa progéniture le lendemain : ils partageront à trois le butin, les salopiots ! Vous ajoutez à cela deux femmes flics suspicieuses qui les traquent plus deux jeunes mafieux sur leurs traces (la mère de l'enfant ayant des antécédents gratinés) et vous obtenez un petit road movie avec moult rebondissements... C'est plutôt intéressant sur le papier, d'autant plus lorsque l'on connaît la capacité de Kore-eda à apporter de la profondeur à ses personnages avec toujours cette petite pointe d'humour et d'émotion dont il est capable... Rapidement, of course, notre trio de vendeurs va gagner en humanisme : nos deux vendeurs sont liés à des orphelinats auxquels ils sont dévoués, l'un d'eux (l'incontournable Song Kang-ho qui a raflé un prix d'interprétation à Cannes pour un rôle, ma foi, beaucoup moins spectaculaire que ce à quoi il nous avait habitués...) veut à tout prix reconquérir la fille et la femme dont il est séparé (une grosse somme d'argent pourrait permettre, se dit-il, d'arrondir les angles), quant à la jeune fille, bien entendu, elle est loin d'être aussi insensible que cela au devenir de son gamin... Ces trois-là, plus le bébé dont il semble forcément plus difficile que prévu de de se défaire, et un autre gamin échappé d'un orphelinat vont vite se révéler très complices, plus dans l'entraide que dans le crime... Tout cela est ma foi bien mignon, mais peine diablement à convaincre : nos deux femmes-flics, vite attendries par la situation, ont bien du mal à s'imposer (et la situation déjà peu crédible au départ perd encore en réalisme...), les deux malfrats sont aussi inquiétants que moi aux fléchettes, et même si notre trio s'est mis terriblement dans la mouise avec ce projet complétement dingue, on sent que chacun devrait plus ou moins être capable (ils ont si bon fond...) de trouver une issue favorable à cet imbroglio. Du coup, le suspense est ramollo, leur mea culpa terriblement téléphoné et les petites situations burlesques par trop attendues. Kore-eda en voulant charger un peu trop la mule au niveau de l'humanité existentielle de ses personnages leur enlève toute véritable aspérité et leur gentillesse forcenée peine à faire poindre toute réelle émotion... Un sympathique voyage qui permet à chacun d'évoquer ou de remettre en cause son lien à la paternité/maternité (thème de prédilection du réalisateur nippon) qui débouche sur une comédie un peu molle et gentillette.