LIVRE : Sur les Chemins de Chine de Clara Arnaud - 2010
Clara Arnaud (qui rime pour moi avec apéro, rapport à sa mère et le private joke s'arrête bêtement là) nous emmène en terres chinoises sauvages puisque l'idée lui prend, à tout juste 21 ans, avec pour seul compagnon un cheval (ou deux) de traverser le pays ouïghour, puis le plateau tibétain - en 2008, juste avant les JO, alors même que l'Etat craignait tout débordement dans ces régions contrôlées de plus en plus par l'armée... Disons-le franchement, cela donne forcément le goût de l'aventure : dès les premières pages, l'envie nous prend de balancer notre Bescherelle bien inutile devant des enfants qui ne conjuguent souvent que les emmerdes, de remplir une valise de trois tee-shirts et de partir à son tour en compagnie d'une âne ou d'un zébu dans une contrée où les paysages ont encore l'ascendant sur l'homme. Puis on se calme et on reprend sa lecture. Clara Arnaud, qui se donne quelques semaines de "sas" en Chine pour approfondir sa connaissance du chinois à l'université, a tôt fait de cerner deux ou trois petits points "particuliers" de cette civilisation en marche - le désintérêt (plus ou moins forcé) des jeunes pour la politique, l'envie de chacun, avec ses moyens, de tracer son chemin, le peu de conviction face à la défense de la "liberté d'expression" tel qu'on la conçoit en Europe, etc... Elle parle un peu avec le sérieux de son jeune âge, démontre un peu rapidement ses idées sur la chose après avoir interrogé juste une poignée de gens, mais on sent qu'elle a la tête sur ses épaules et qu'elle n'est pas là pour s'en laisser conter. Puis démarre enfin son voyage... L'influence de Bouvier se fait sentir dans sa conception du voyage mais on sent que rapidement elle cherche à suivre sa propre route, entre découverte des autres et découverte de soi-même... Peut-on encore jouer aux aventuriers en 2008 ? Bien bonne question. Alors pas forcément et l'échec de la première tentative de voyage en pays ouïghour aurait pu rapidement sonner le glas de cette tentative de voyage en solo... dans un territoire où les pelleteuses se font dorénavant plus présentes que les arbres. Mais Clara Arnaud, et c'est tout à son honneur après ce premier échec avoué, ne s'avoue pas vaincue pour autant et relance l'expédition en pays tibétain. Si les fans invétérés de Bouvier (le métaphysicien de l'esprit du voyageur ?) ou tout simplement d'Histoire pourraient être déçus et trouver les analyses de la voyageuse parfois un peu courtes, ils risquent de l'être beaucoup moins, déçus, lors celle-ci se contente tout bonnement de raconter ses rencontres, ses mésaventures météorologiques, ou encore sa communion avec le paysage et ses chevaux. Avec une maturité souvent hallucinante, on sent une personne décidée à en découdre et à aller jusqu'au bout de voyage, non pas pour s'y perdre dans la nuit, mais pour repousser toujours plus loin sa soif de découverte et de réflexion sur soi-même. En cela, ces carnets sont passionnants, le périple est prenant et on lit d'ailleurs la chose quasiment d'un seul souffle. Si, si, c'est remarquable et on salue forcément (avec dix ans de recul) ce jeune talent en herbe (de yack). Et sinon, fourmis ou pas fourmis dans les mollets ? Bon, je vais déjà prendre des cours d'âne et me faire les Cévennes comme simple round d'observation. Mais euh, oui, of course...