The Souvenir : Part II (2022) de Joanna Hogg
Après une première partie qui m'avait laissé mi-figue, je redonnais une chance à l'Anglaise Joanna : alors, c'est un peu différent, vu que cette seconde partie me laisse mi-raisin ; je m'explique : le concept, lui, est assez brillant en soi pour toute personne qui aime à se pencher sur tout ce qui est en lien avec la mise en abyme - jugez du peu : après avoir retracé dans la première partie sa propre vie avec son drogué (caché) de compagnon, Joanna, dans la seconde, via son alter ego dans le film (Julie, interprétée par Honor Swinton Byrne) fait réaliser par celle-ci un film sur sa liaison avec son compagnon. Voyez, c'est une mise en abyme abyssale, dans le genre, une sorte d’œuvre pour le moins auto-centrée à l'image de cercles provoqués par un petit caillou jeté dans l'étang d'une vie... Vous avez du mal à suivre ? C'est pas si grave en soi. Pour la faire courte, on se dit que ce scénario est diablement malin, d'autant que la bougresse, Julie, semble persuadée qu'en mettant en scène ce film sur son compagnon décédé, elle trouvera le moyen de tourner la page - Joanna aura donc elle la possibilité de tourner deux pages... Dans cette deuxième partie, on se concentre surtout sur les difficultés de Julie à réaliser ce film, à convaincre ses profs (c'est son film de fin d'étude), ses techniciens ; elle-même se retrouve sur la corde raide, tentant de retrouver une confiance, une sécurité chez des parents qui ne lui en apportent guère (la mère, Tilda, notre cauchemar de Memoria, un peu plus sensible ici tout de même, et le père, fataliste, aussi impliqué qu'un joueur de maracas dans un orchestre interprétant la cinquième symphonie de Beethoven), tentant de se reconstruire aussi en dehors sans franchement trouver d'individu à sa mesure (une histoire d'un soir aussi fragile et glauque qu'un kleenex, et un autre espoir vite déçu : tu voudrais venir prendre un verre chez moi ce soir, demande-t-elle timidement à ce monteur si attentif à ses problèmes, euh non répond-il, mon compagnon ne va pas fort en ce moment - ok laisse tomber : quand ça veut pas...)... S'il est difficile de ne pas tomber sous le charme de cette construction narrative tortueuse, en miroirs, de ne pas tomber sous le charme de cette actrice aussi pâle qu'un cierge mais plus sexy qu'un curé, j'avoue une nouvelle fois avoir eu un peu de mal à succomber à ce rythme un peu lymphatique, à cette image un peu délavée, blanchie (comme de la viande anglaise), à cette histoire qui, à force de tourner en rond, lasse plus qu'elle ne donne vraiment le tournis. On voit bien, même dans cette séquence onirique sur le tard, toutes les obsessions que trimbale cette héroïne, toute cette terrible porosité entre la vraie vie et le cinéma, entre la mise en scène de l'une (ce compagnon qui cachait si bien son jeu, dont elle fut longtemps dupe) et celle de l'autre (Julie et ses directives parfois très précises au niveau du cadre, mais sans doute aussi un peu flou au niveau de la direction d'acteur), mais on peine à adhérer pleinement à cette histoire qui manque un peu de sang... Un film de Hogg qui vaut certes bien un hug mais sur lequel on aura du mal à franchement plus s'épancher.