LIVRE : Abandonner un Chat : Souvenirs de mon père (Neko o suteru) de Haruki Murakami - 2022
C'est un petit ouvrage sans grande prétention que nous livre ici Haruki mais dans lequel on retrouve avec un vrai plaisir sa petite musique doucement nostalgique. Ici deux souvenirs, deux éléments se font échos : l'abandon d'un chat (histoire, heureusement qui se termine bien... sinon j'y serais resté au bout de trois pages - je suis émotif en ce moment) et la discrétion de ce père, tout au long de sa vie, un père discret mais tenace, sur lequel revient en quelques chapitres un Murakami qui a fait ses petites recherches historiques persos... Il y avait la peur de découvrir que ce père ait participé aux exactions de Nankin (un trauma, donc, qui n'est pas que chinois, comme quoi) et puis surtout la volonté de savoir par quel miracle cet homme, trois fois appelé sous les drapeaux de son pays (de la guerre en Chine à la fin de la seconde guerre mondiale), était parvenu à s'en sortir. Murakami, avec son petit air de ne pas y toucher, de ne jamais chercher les grandes phrases ou les envolées lyriques, le symbolisme facile, remue à la petite cuiller l'histoire de cet homme et de ce temps qui n'en finira jamais de hanter les générations nipponnes suivantes et à venir. Si les illustrations (simplistes et minimalistes) n'apportent pas grand chose, elles permettent au moins de fixer notre regard le temps de savourer un petit haïku balancé par le père de Murakami. Alors oui, certes, Murakami trouvera dorénavant lecteur même s'il publiait un livre de recettes et on pourra trouver la chose un rien légère (de par sa longueur tout du moins). Mouirf. Mais cela permet aussi de patienter en attendant du plus roboratif... Un gentil petit conte (à rebours) de chat pas trop perché. (Shang - 27/01/22)
On ne saurait mieux dire : c'est un petit, tout petit, tout petit petit livre que celui-ci, qui n'a l'air d'exister franchement que pour faire débourser 17 euros supplémentaires au fan. Bien bel objet, c'est vrai, mais on se demande bien pourquoi avoir sorti la belle couverture, le papier brillant et les illustrations clinquantes pour un texte aussi anecdotique et sans saveur. Haruki raconte son père, n'a pas grand-chose à en dire, compense avec un semblant de nostalgie un peu pépère, et boucle ça dans ce bel écrin bourgeois, emballez c'est pesé. Qu'est-ce que raconte ce petit texte en effet, qui n'aurait sûrement pas trouvé, vu son peu d'intérêt sa place dans un recueil de nouvelles du bougre ? Que papa a fait la guerre et failli y passer, mais pas vraiment ; qu'il a écrit des haïkus, pas inoubliables ; qu'il emmenait son fils aux matchs de base-ball, bon ; et que les deux se sont un peu perdus de vue pendant de longues années pour on ne sait trop quelles raisons. Rien de bien palpitant, quoi, ni au niveau de la trame ni surtout au niveau du style. Abandonnant son ton magique habituel, Mura est pris ici en pleine paresse d'écriture, qui devient transparente et plate comme rarement dans sa carrière (souvenir d'un Underground de triste mémoire, tout aussi pauvrement troussé). On croirait des notes éparses, pas rédigées, que le bougre aurait mis hâtivement ensemble sans de vrai projet global. L'illustrateur, Emiliano Ponzi, se retrouve un peu pantois face au manque de matériau, et ne sais pas trop quoi illustrer. Il pond donc quelques dessins (d'ailleurs vigoureux) illustratifs, qui redoublent péniblement le texte. Une gentille arnaque, quoi, comme Murakami nous en propose à intervalles réguliers, une arnaque pas désagréable nonobstant. (Gols - 18/03/22)