Une Histoire d'Amour et de Désir (2021) de Leyla Bouzid
Oulala, gros non-coup de cœur que cette histoire d'amour soi-disant "moderne" entre un fils d'émigré algérien et une Tunisienne - tout donne l'impression que le cinéma n'a pas évolué depuis quarante ans (il y a juste le verlan en plus), et cette histoire d'amour "intemporelle", qui se plaît de citer au passage la littérature arabe d'il y a mille ans, semble au final aussi datée que les pantoufles de ma grand-mère. L'histoire en elle-même est basique (mais why not) : un jeune homme peine à déclarer sa flamme à sa camarade de classe (ils sont en fac de lettres à la Sorbonne) ou, plus précisément, à passer à l'acte. Nous voici donc devant un garçon tout contrit, tout mal dans ses pompes, qui tente désespérément de faire comprendre à ladite femme qu'il a besoin de temps... Les cours de littérature filent la métaphore de cette dichotomie entre désir sexuel et amour éthéré avec des ficelles grosses comme les câbles de la Tour Eiffel et on soupire comme la jeune fille devant cette passivité terrible de ce jeune homme tout inhibé, tout enamouré mais bloqué de par ses "idéaux"... Une fois qu'on a saisi la chose (au bout de cinq minutes), on espère que rapidement la situation va quelque peu évoluer... Que nenni, il faudra nous taper pendant quatre-vingt-dix-minutes la mine défaite de ce pauvre garçon et les haussements de sourcils d'exaspération de cette pauvre fille et assister comme un rond de flan à cet amour qui crie son nom mais qui met des plombes à accoucher... On eût pu, sur le même thème, faire un film terriblement léger, totalement romantique, joliment littéraire... Ici, tout tombe à plat tellement le rythme lent, les dialogues pauvres et les lectures, susurrées forcément du bout des lèvres, banalement mièvres... La caméra de Bouzid semble aussi lourde à trainer que ce garçon d'un autre temps qui semble prendre un malin plaisir à jouer les boulets... La jeune femme, elle, de plus en plus pâle derrière sa coiffure qui tel un arbre cache sa déception, devient un fantôme et on observe ces deux ombres en trépignant de plus en plus d'impatience... Comme la toile de fond "sociale" (la cité) est également affreusement plate (les potes de la teci qui rejettent l'intello, super), les relations familiales affreusement banales et molles (le père, chômeur, lettré et las ; seule la petite sœur a du caractère... et se marie à douze ans), et les cours en fac d'une tristesse absolue, la chose finit par nous tomber des yeux... Quand les corps commencent enfin à se toucher (on se demandait presque si ce n'était pas le premier film à l'ère du covid...), on ferme les yeux de rage - too late. Desireless.