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8 juin 2022

Flee (2021) de Jonas Poher Rasmussen

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Il est vrai que je tente un peu le diable avec ma sélection "from a true story" mais avouons tout de même ici que c'est pour la bonne cause puisque Rasmussen se penche sur l'histoire "incredibeule" d'un Afghan qui, très jeune, avec sa mère et ses frères et soeurs, au début des années 80, tenta de fuir son pays. Oui, l'histoire se répète, on le sait, un peu trop souvent. Plutôt que d'essayer de nous livrer une œuvre d'un réalisme forcément poignant et too much, Rasmussen a l'idée de livrer la chose sous forme de dessin animé (avec ici ou là quelques images d'archive des pays traversés). Avec des lignes claires, mais avec aussi une grande sobriété, les traits de ce dessin-animé reviennent sans trop charger la mule sur les instants de doute, d'angoisse ou encore l'horreur de certains faits... Parce que, à force d'écouter parler des nantis de droite à propos des réfugiés sur des plateaux télé (et de gauche, ah oui aussi... mais existe-t-elle encore ?), à force d'en écouter parler comme s'il s'agissait de simples pestiférés que l'on peut balayer d'un revers de la main ("moi je dis stop ! on ne peut accepter toute la misère... / eh bien moi je dis ta gueule"), on oublie parfois, hein, que ces derniers n'ont pas toujours eu le choix de partir, déjà, et que secondo ils ont dû pour ce faire vivre des traumatismes tels qu'une vie ne suffira jamais pour les oublier. Ici, notre Afghan, arrivé à l'âge adulte, peu de temps avant de se marier avec son compagnon, tente, devant l'un de ses amis, de s'ouvrir enfin sur son passé : la perte du père, l'éparpillement de la fratrie, la dévotion et le combat de la mère, l'entraide, les voyages éprouvants, le stress, la terreur d'être sans papier quand on se retrouve notamment, en transit, dans un si beau pays que la Russie avec ses flics incorruptibles (!!!), la peur de ne plus voir le jour, de ne plus jamais voir les siens, l'obligation de faire confiance à des tiers et de se retrouver traités comme des moins que rien... Oui, dans ce Flee, aucun de ces épisodes ne nous est épargné, mais Rasmussen, disais-je, trouve le bon ton, la bonne distance, pour évoquer tous ces cauchemars éveillés sans tomber dans le misérabilisme, pour évoquer cette "déshumanité" galopante sans en faire des caisses : être réfugié, c'est devoir fuir sans espoir de retour, c'est devoir partir sans guère d'espoir d'être un jour accepté. Et c'est vrai qu'on l'oublie quand on s'est donné la peine de naître à Neuilly et que l'on passe son temps à devoir défendre des privilèges pour lesquels on ne s'est d'ailleurs jamais battu personnellement ; bref, je m'emballe, je suis à deux doigts de faire de la politique bordel. Un film qui n'a, apparemment, pour l'heure, pas encore  de distributeur en France, et c'est bien dommage tant il semblerait parfois utile de rappeler à certains blablateur la véritable souffrance des gens : pour l'estimer, au moins, pour ne pas dire de la merde, à défaut de la comprendre. Un témoignage dur mis en scène avec une belle humanité et une vraie humilité par un Rasmussen lucide et grave. Fi.   (Shang - 23/11/21)

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On est bien d'accord, même si je ne suis pas non plus complètement emballé par ce film, je le reconnais tout en dignité et en pudeur. Deux obstacles m'empêchent d'adhérer à la chose à 100% : l'animation d'abord. Techniquement, c'est quand même très pauvre, avec ces mouvements saccadés, ces gestes manquant de fluidité, et on a souvent un peu mal aux yeux devant l'indigence esthétique de la chose. Si les flash-back horrifiques sont assez réussis, avec cette façon très distancée de tout à coup "déréaliser" les scènes les plus violentes, les transformer en abstraction, en crayonnés, ces choses indicibles, les séquences plus réalistes (notamment les contemporaines) apparaissent un peu bâclées. Je ne demande pas un rendu Pixar à la chose, bien sûr, j'aime ce côté fait man qui colle bien au sujet, ce côté artisanal dans le rendu ; mais j'aurais bien aimé que tout ça soit un peu mieux travaillé techniquement, histoire de me plonger réellement dans l'histoire. Très réussis, cela dit, ces allers-retours sur les images d'archive, qui forment un parallèle troublant (la manifestation au MacDo, avec ces images réelles qui sont comme un contre-champ aux images animées) ; et les dessins en eux-mêmes sont aux aussi joliment colorés dans des couleurs chaudes, réconfortantes, cassées tout à coup par une palette très dure.

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Deuxième réserve : sur ce sujet, difficile de faire autrement que de plonger dans les clichés. Et Rasmussen y tombe plus souvent qu'à son tour. Non que le soupçonne d'insincérité : son récit respire l'authenticité, et est de toute évidence profondément indigné. Il parvient même à nous transmettre cette rage (la corruption des flics russes) ou cette angoisse (la claustrophobie d'un groupe de migrants enfermés dans un container, moment terrible). Mais ce qui sous-tend tout ça est un discours mille fois entendu, une imagerie usée jusqu'à l'os, un fond que Rasmussen a beaucoup de mal à ré-inventer. C'est le syndrome inhérent à ce genre de film, l'enfonçage de portes ouvertes. Il est bon de rappeler toujours ce genre de choses, certes ; mais entendre ce triste récit d'exil forcé, d'odyssée horrible, d'intégration difficile, de déracinement raconté toujours de la même façon, donne un peu l'impression que Flee vient s'ajouter à la liste, sans rien apporter de nouveau. C'est dommage, parce que le film a vraiment des qualités, ne serait-ce que dans son traitement animé pour raconter ça, ou dans l'ajout d'une thématique intéressante : l'homosexualité du héros, qui ajoute encore à la difficulté de son histoire. Bien bien, mais insuffisant, dirais-je...   (Gols - 08/06/22)

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