Journal d'une Femme Médecin (Joi no kiroku) (1941) de Hiroshi Shimizu
Ma réserve shimizuenne s'épuise, il faudra songer à un remplaçant... En attendant, on retrouve ici le cinéaste nippon dans ses œuvres : une petite troupe de femmes médecins posent leur quartier à la campagne : au programme, horde de bambins à discipliner (ou pas), un prof bien attrayant (la mizoguchienne Kinuyo Tanaka n'a d'yeux que pour le sage Shin Saburi) et des habitants plus ou moins résistants devant cette marche en avant du progrès (médical)... Les conditions de vie (des maisons dans l'ombre des forêts, des bains sporadiques...) et les croyances locales (le prêtre du coin et ses prières à deux balles) n'aident pas toujours nos docteurs en herbe dans leur tâche. Il faudra de la persévérance, en particulier chez la cheffe Kinuyo pour s'approcher des familles les plus distantes, qui préfèrent notamment cacher leurs filles malades pour ne pas hypothéquer leur chance de mariage... Kinuyo, heureusement, peut puiser de l'inspiration chez ce prof qui se fond parfaitement dans le paysage ; il lui semble tout même difficile d'envisager avec lui une liaison éventuelle à la ville... A elle, de faire le choix d'une vie...
On est dans un cadre champêtre, avec des gamins qui ont tendance à vouloir sauter dans la rivière malgré les mises en garde d'infirmières un peu précautionneuses, mais le ton demeure tout de même assez sérieux : les malades défilent dans le dispensaire, on se doit d'aller visiter les maisons les plus reculées où nos infirmières ne sont pas toujours bien reçues et certaines opérations s'avèrent particulièrement coton - qu'il s'agisse de ce grand-père hermétique aux soins (la peur de devoir payer... alors que c'est gratuit) ou de ce bambin, atteint d'une pneumonie, qui débarque avec les lèvres bleues... Nos petites mains en blouse blanche devront faire preuve de foi pour améliorer la vie de nos paysans guère au fait des règles d'hygiène de base. Malgré quelques petites scènes truculentes entre enfants (les tout-terrains, les lèche-cul, les empathiques...), le ton reste donc assez docte ; quant à la romance possible entre nos deux stars, elle reste dans le domaine du possible (...), chacun semblant un peu trop dédié à son travail pour pouvoir se donner le temps d'une ritournelle amoureuse... Le film garde son petit ton documentaire, pédagogique, pas forcément déplaisant, mais on avoue qu'on aurait souhaité un peu plus vibrer (sentimentalement) devant la réunion de ce docteur et de prof au service de cette communauté - un ultime petit sourire en coin de Kinuyo Tanaka nous laisse tout de même imaginer une suite (hors-champ et dans les champs) plus tendre... Un journal bien tenu, sans excès de folie, malgré les beaux mouvements de caméra sur cette campagne radieuse.