La Voix humaine (The human Voice) (2021) de Pedro Almodóvar
Toujours pas de salle de cinéma mais la vieille garde continue de faire des films. Almodóvar nous livre une œuvre à demi-jauge (une trentaine de minutes) en adaptant librement le gars Cocteau. L'occasion pour lui de mettre en avant la mélodramatique Tilda Swinton : un décor de studio à peine dissimulé (l'occasion pour Pedro de soigner son intérieur et de fourbir l'appart de divers portraits de femme se mettant à nue), une rupture amoureuse, un dernier coup de fil pour faire le bilan... L'occasion pour la Tilda de dire tout ce qu'elle a sur le coeur, sa tristesse, son désespoir, sa joie d'avoir passé quatre années à ses côtés, sa détresse, sa colère, son acceptation, son calme... avant un ultime geste en forme de pied de nez, un ultime geste pour que la phénix Tilda puisse renaître... Tilda avoue que cette liaison lui a fait perdre son humour, un peu comme Pedro en quelque sorte, dont ressort ici uniquement l'emportement amoureux et la déception qui s'en suit. C'est lyrique (grande nappe musicale), c'est mordant (la Tilda s'emporte, s'emporte parfois), ça monte puis cela retombe un peu mollement - on regarde la prestation de Tilda en connaisseur, à distance, sans jamais que l'émotion nous touche ; oui, les couleurs sont vives, oui la mise en scène n'est jamais statique, oui c'est un portrait de femme passionnée, emballée, lucide comme Pedro les aime, mais avouons que ce petit morceau de bravoure est un peu court en bouche - pas vraiment de truculence, de causticité, de regard grinçant et on soupire un peu devant cette petite chose bien faite mais sans réelle plus-value, un peu à l'image de ce chien qui joue très bien l'exaspération. Eh oui, ça va lui faire 72 ans au Pedro, plus le temps des cabrioles rigolotes (mais avec pas moins de quatre projets sous le pied : la vieille garde, le retour !). Un almos calmos où sa petite voix tente de surfer sur cette déchirante et déchirée humanité... Trop attendu.