ADN (2020) de Maïwenn
Maïwenn ô Maïwenn met en scène Maïwenn dans un film écrit par Maïwenn (et Mathieu Demy qui semble également inspiré par les "histoires de famille") et l'exercice de vouloir a priori se livrer sans fard (et sans lentille de couleur) tourne un peu à l'obsession du moi ô mon moi mon tout mon moi. Point besoin de charger la mule ici, la réalisatrice s'en charge elle-même : à l'occasion de la mort du grand-père, figure centrale et respectée de la famille, l'heure des comptes a sonné. Si Maïwenn ô Maïwenn se plaît à se montrer sous des dehors guère sympathiques, passant son temps à régler des différends avec les divers membres de sa famille, elle effectue en parallèle un petit travail sur elle-même pour se rapprocher de son moi (test ADN, changement de nationalité pour se rapprocher de "ses racines"). C'est un exercice auto-réflexif et auto-filmique qui devient rapidement un brin agaçant en soi, même s'il permet au détour d'une ou deux scènes de balancer quelques vacheries sur "l'ambiance familiale de merde" de toute grande famille qui se respecte qui font sens...
On ne pensait pas au départ que la cinéaste se prendrait comme personnage principal : après un (faux) départ où elle semble vouloir se focaliser sur les derniers jours de ce grand-père, elle revient vite à la "réalité" ; oups, le sujet véritablement intéressant, c'est elle, l'héritière auto-proclamée de cet homme. Le sujet eut pu être intéressant s'il eut été traité avec un peu plus de rigueur. Là, Maïwenn ô Maïwenn traite d'une façon on ne peut plus superficielle des événements en Algérie et ses conséquences diverses (difficile, soit dit en passant, de ne pas qualifier également la fin de terriblement opportune : Maïwenn, même dans cette foule qui manifeste pour des raisons très précises, reste pour la caméra le point central - brrrrr), remplissant les autres cases de son film avec divers imbroglios familiaux classiques. Si Fanny Ardant en marâtre irascible livre une composition qui fait froid dans le dos, si Louis Garrel apporte comme toujours sa petite pointe d'ironie pour rendre les diverses tensions un peu plus soutenables, si les discussions à bâtons rompus pour décider de tel ou tel cercueil ou du déroulement de la cérémonie font preuve d'une certaine dynamique, le reste du film qui vire à l'exercice auto-centré paraît plutôt vain : comme si ce portrait à charge de la famille (ses tares, ses personnages individualistes à crever...) était finalement réalisé uniquement pour divertir ladite famille (ohohoh tu n'y vas pas de main morte sur ce "père" généralement aux abonnés absents et devant lequel on évoque de façon très équivoque ce qu'est la pédophilie...). Un film qui se veut sans doute "très personnel" et qui aurait dû le rester.