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28 octobre 2020

Dying at Grace (2003) de Allan King

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Voilà un documentaire exigeant, éprouvant qui demande une sacrée dose de pugnacité pour en venir à bout : le sujet est rugueux, King décidant de filmer (avec leur autorisation, cela s'entend) cinq personnes qui sont au bout de leur vie, touchées par des cancers en stade final et des maladies diverses... Et il les filme, pour certains, jusqu'à leur tout dernier souffle, jusqu'à leur dernière respiration, quand tout finalement s'arrête. Ah oui, je ne sais trop si ce genre de doc est particulièrement adapté à la situation actuelle, mais le moins qu'on puisse dire c'est qu'il fait froid dans le dos... Le plus terrible, c'est sans doute que là, rien n'est du cinéma, personne ne triche, personne ne joue. On suit le quotidien de ces cinq personnes, entre prises de médicaments et visites, et prostration, et discussions, et ultime sursaut lucide avant l'ultime plongeon qui, disons-le, est parfois terriblement brutal. On sent quand le corps et l'esprit lâchent, lorsque la respiration se fait tout d’un coup grumeleuse, terrible, caverneuse et l'on finit par être scié de voir ces terribles dernières respirations semi-automatiques alors qu'on sent bien que la personne est "inconsciente", a lâché prise, que le dernier sursaut de la machine du corps est une question d'heures, de minutes, de secondes. Et tout s'arrête et l'on demeure presque autant figé que ce corps qui nous semble tout d'un coup jaunir. Brrrr.

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Ils sont cinq, dans des états diverses, il y a cette italienne déjà très âgée, qui ne parle presque plus, et dont les yeux ont commencé de manger le visage. Il y a cette dame digne, non croyante, qui a déjà perdu au cours de sa vie tous ses proches, et qui ne voit franchement pas pour quelle raison elle prierait ce type ingrat qui nous snobe de là-haut. Il y a ce baroudeur, ce survivant (jusque-là) qui a pris au cours de sa vie toutes les drogues du monde, dont la barbe même transpire l'héroïne, qui se picole encore sa petite bière et se fume sa petite clope à l'occase. Il se fait du souci pour ses revenus qui fondent, ce souci-là ne va guère durer. Il y a cet homme entre deux âges, soutenu par son compagnon et sa famille qui l'entourent jusqu'à la fin de cette longue et calme agonie. Il y a enfin cette femme dont le cancer se généralise, fataliste, et dont l'état va se détériorer brutalement, comme si la foudre avait décidé de lui tomber dessus, sans vent, sans éclair préalables... Ces personnes reçoivent la visite de proches, parlent avec les aides-soignantes ou des personnes qui "allègent leur conscience" - la religion, parfois, c'est une référence, on sent derrière le truc une grosse expérience de la mort -, font une dernière sortie dont ils reviennent rarement en pleine forme. Il faut souligner le professionnalisme impeccable de ces personnes qui bossent dans cet hôpital de Toronto, aux petits soins pour leurs malades, pour leur éviter les douleurs et leur conseiller toute sorte de pilules, pour venir quotidiennement prendre de leurs nouvelles, apaiser leur chagrin, les soutenir dans cette ultime étape... Que dire si ce n'est qu'on se prend ici la réalité de plein fouet dans la face, constatant la solitude des uns, la résignation des autres, plein d'empathie à la fois pour ces malades (putain, qu'on me tire une balle plutôt que de respirer pendant des heures à vide), pour ce personnel hospitalier qui côtoie la mort au quotidien (dans le top 3 des métiers harassants et minants juste après conducteur de bus et prof (...)) et pour cet entourage qui voit bien que le dernier moment est proche : il y a ceux qui ont eu le temps de se faire une raison, et ceux qui ne peuvent que se réfugier dans le chagrin... Je ne sais trop à qui conseiller la vision de la chose en ces temps où l'hallali résonne mais quiconque en quête de « caméra-vérité » devrait finir à genoux devant ces 140 minutes, parfois disons-le franchement insoutenables (mais il faut bien voir la vie comme la mort en face…), signées du grand King (un monument de pudeur et d'effacement en terme de filmage, digne de Wiseman ou de Depardon). J'en ai l'échine encore congelée.

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