Evasion du Japon (Nihon dasshutsu) (1964) de Kijû Yoshida
Petite incursion de Yoshida dans le polar qui part en quenouille, et ce n'est pas forcément la veine yoshidienne qu'on préfère. Le héros, Tatsuo, un petit branleur qui se rêve en crooner aux States, se retrouve malgré lui associé à un casse. Avec la complicité d'une jeune femme, Yasue, les trois bandits braquent les coffres d'une boîte de bains turcs... Tatsuo est trouillou comme pas deux et les deux pontes qui jouent les durs se révèlent guère plus doués pour ce genre d’exaction : le boss est constamment en manque de drogue et celui qui perce les coffres s'évanouit en pleine action, chalumeau en main. C'est un miracle qu'ils parviennent à s'échapper mais les mésaventures de nos trois pieds-nickelés sont loin d'être terminées. Tatsuo, gun en main, est aussi adroit que moi au cor de chasse, et a le chic pour se retrouver dans des situations pour le moins inconfortables... Yasue, qui finit par s'associer avec lui, se moque de sa guigne (le plus mauvais et le plus couard des bandits de tous les temps), et ce même si Tatsuo a une chance de folie pour échapper à la traque de la police...
Une image assez granuleuse, un montage efficace, des cadres soignés mais sans plus (petite préférence pour les plans en plongée, caméra collée au plafond), on ne retrouve pas forcément la patte de Yoshida dans ce polar tragi-comique. Tatsuo est comme un chien dans un jeu de quilles dans le monde de malfrats et l'on ne donne dès le départ pas cher de sa peau. Tremblant de peur quand il tient quelqu'un en joue, on se dit que le type manquerait un éléphant dans un couloir - et pourtant il fait mouche et descend des types (violeur, yakuza...) face auxquels il ne faisait pas le poids… On suit les pérégrinations de Tatsuo sans déplaisir même si la tension vient plus de lui-même que de l'extérieur - le type, perpétuellement sur les nerfs, s'imagine dès le départ dans les rets de la police. Il a heureusement une sorte d'instinct de survie qui lui fait gagner la confiance de la rotonde Yasue et qui lui fait approcher son but : quitter le Japon. Mais le type a la guigne : outre le fait que sa compagne d'infortune paume la thune lors d'une course nocturne dans la campagne, la seule destination qui s'offre à lui, en cette veille de Jeux Olympiques, n'est pas les States mais la Corée... Il ronge son frein, hésite à se barrer chez les voisins, et on se dit qu'il faudrait un ultime miracle pour qu'il s'en sorte sain et sauf, les flics comme les bandits n’ayant aucune raison d’avoir pitié de cet hurluberlu devenu ennemi public numéro 1. Yoshida fait un petit clin d'œil assez caustique au relais de la flamme olympique alors même que Tetsuo tente de larguer tous ses poursuivants... Un polar avec son lot d'aventures et de personnages chelou, mais avouons qu'on attendait un peu mieux de l'esthète Yoshida qui signe une farce-poursuite où le grotesque côtoie la violence pure.


