Simone Barbès ou la Vertu (1980) de Marie-Claude Treilhou
T'en veux du "female gaze", je vais t'en donner moi du female gaze ! (C'est quoi le female gaze ? Ferme-la). Marie-Claude Treilhou (on sent que c'est son vrai nom) nous embarque dans l'un de ces bons vieux cinémas pornos qui faisaient encore la joie des eighties (le Cinémonde à Clermont, c'était pas rien... Le Cinimmonde ? Oui, c'est ça). Deux ouvreuses tapent la discute pendant la première partie du film, seulement interrompues par le flot des clients, casse-couilles comme peuvent l'être seulement tout homme qui se respecte un peu (des dragues à deux balles, des anecdotes dont on se fout, des histoires drôles sous la ceinture, des complaintes, des râlements, des feulements...). Elles font passer le temps en regardant ces hommes qui passent, notant leur lourdeur, bouffant un sandoc, buvant du guignolet, évoquant leur petite vie aussi terne que ce hall. Lourd parmi les lourds, on notera l'apparition de Noël Simsolo en réalisateur belge de film porno qui ne peut s'empêcher de critiquer (forcément) les conditions de projection. Ok. L'une des ouvreuses (Ingrid Bourgoin) se casse et décide de passer la nuit dans un lieu interlope, un cabaret où une forte proportion de femmes (female gaze) se donnent rendez-vous. Une boîte à lesbiennes, quoi, avec quelques hommes curieusement endimanchés (reconnaissez Pascal Bonitzer et vous gagnerez une perruque). Ambiance ambiance, comme on dit, ambiance de nuit, feutrée, tendue (notre ouvreuse ne parvient pas à ramener chez elle la donzelle qu'elle fréquente), en chansons (chacun ses goûts sera mon seul commentaire), voire super tendue (il y aura même un meurtre ! Faut dire le type était relou - female kill). Une dernière partie pour la route : l'ouvreuse se fait prendre en bagnole (même si c'est elle qui prend le volant) par un type en goguette, loser absolu, qu'elle noie de paroles. Les hommes ne sortent pas vraiment grandis de cette histoire de femmes entre elles - qui, de leur côté, s'emmerdent un peu quand même.
On est dans le petit film fauché, dans la petite tranche de vie vue (et c'est bien là le seul intérêt) par des femmes. Si, disais-je, rien de bien passionnant se passe entre elles (elles se brouillent, oublient, parlotent, dragouillent, oublient, se cassent), cela permet de mettre en scène des spécimens mâles sans grande envergure, c'est le moins qu'on puisse dire. Plus d'un, sous divers oripeaux (du petit mecton timide au "baron") tente de se la jouer "roi de la séduction" et, avec ses petits airs de mégot, finit par se faire balancer ou, tout du moins, rabattre sa gueule - c'est franchement pas plus mal, le mâle (notamment celui qui fréquente les cinoches pornos mais je ne juge pas) est plus souvent pathétique qu'à son tour. Bon, et les femmes, sinon ? Ah ben ça, elles ne sont pas les dernières pour chercher à animer ce cabaret : chansons françaises (ma grand-mère à la batterie), rock français féministe en perfecto (ça va flinguer la carrière de Renaud), numéro de gladiatrices en tenue "osée" (tenterais-je), ça fuse fuse fuse dans ce cabaret (enfin, on s’emballe pas non plus…) où nos femmes se tournent autour - des regards, quelques bisous, peu d'action : de la drague gaze (plus légère donc), en quelque sorte. Un petit film français de femmes entre elles, bien, c'est déjà ça de pris... A consommer tout de même avec modération, hein, on ne va pas faire montre de trop de zèle non plus (mais c'est quoi bordel le female gaze ?)