The Souvenir (2019) de Joanna Hogg
Ah les films anglais, c'est quand même toujours un effort... Et pourtant, il semblerait qu'on soit là devant ce qui constitue le haut du pavé de l’année 2019. Mouais. Il est donc question ici d'une jeune femme, Julie (Honor Swinton Byrne - fille de, je présume, puisque Tilda joue justement sa mère dans le film) dans la vingtaine, prête à se lancer dans le tournage de son premier film et entretenant une liaison pour le moins toxique avec un type accroc à l'héro (Tom Burke, aussi souriant et dynamique que Benjamin Biolay : une plaie, quoi). L'histoire se déroule dans les eighties (cela justifie-t-il complétement cette image un peu dégueulasse - allons, on se calme) et tend plus à se focaliser sur les difficultés sentimentales de Julie (face à ce type de plus en plus difficile à gérer) que sur ses aspirations artistiques (on pense au départ que le cinéma sera le sujet central mais on s'en éloigne de plus en plus ; on verra bien Julie tourner une ou deux scènes - qui ne sont pas liées forcément avec son projet initial d’ailleurs - mais avec une telle maladresse qu'on sent bien qu'elle n'a pas toute sa tête à cela). Toxique, disais-je, il s'agit bien ici d'une relation qui la vampirise totalement ; déjà qu'elle est de nature bien pâle au départ, elle finit le film totalement exsangue (putain l’héro, c'est un peu comme l'escalade en un sens... T’es jamais loin du vide). Bon.
On demeure quasiment tout du long enfermé dans l'appart de Julie (cela limite les frais budgétaires pour la reconstitution historique), spectateur de ces deux êtres qui respirent autant la joie de vivre qu'une émission des Chiffres et des Lettres : qu'ils baisent, qu'ils discutaillent art ou futilité, on ne peut pas dire que cela transpire la passion, le désir. Même quand ils s'engueulent (il lui pique quand même tous ses bijoux - eh oui, son petit plaisir perso a un coût), cela se fait relativement mollement. Du coup, même si on développe au fur et à mesure un soupçon d'empathie pour cette jeune femme un peu trop naïve (elle ne voit rien venir sur son addiction), un peu trop gentille, un peu trop bienveillante (elle met du temps pour le mettre dehors... puis le revoit - sa propre petite addiction au bonhomme), on suit ce récit gai comme un pinson mort avec un regard un peu alangui, les couleurs téléfilmesques (du 16 mm a priori) n'arrangeant rien. On veut bien reconnaître à cette œuvre, qui relate sans aucun doute possible un chapitre autobiographique de la vie de la réalisatrice, un petit charme dans cette sobriété absolue, dans ce côté un peu suranné (les années 80, c'était hier mais définitivement au siècle dernier...), dans ce jeu tout en douceur de l'actrice... Mais bon, cette tristesse anglaise d'un dimanche aprème, ce manque de jus, laissent quand même méchamment sur sa faim. Hogg serait en train de tourner la suite - on avisera en temps utile mais on n’est pas non plus ultra impatient de découvrir la chose...