Sur les Ailes de la Danse (Swing Time) (1936) de George Stevens
Et pam, pendant que Gols a le dos tourné, j'en profite pour me lancer sur son terrain de prédilection : la comédie musicale. Et attention avec pas n'importe qui en tête d'affiche : Fred Astaire et Ginger Rogers themselves. Je sens que Gols, la tête baissée, les mains sentant encore le hareng dans les poches, le sourire bas est au supplice... Eh ben j'ai bien aimé, dis donc, cette petite chose très virevoltante pour le moins, sans gabegie de chansons pour le coup (♪ A fine Romance ♪ : trop craquant) et avec quelques numéros de danse tout à fait à mon goût, parfaitement. Astaire a beau avoir une tête de suppo ses jambes ont un rythme anti-gravitationnel remarquable et le satellite Rogers tournoie autour de lui avec une légèreté inouïe (cette robe qui s'envole sur ces frêles gambettes est surement ce que j'ai vu de plus beaux récemment depuis le dernier but nantais). Non franchement, cette petite romance qui peine à dire son nom est charmante. Après avoir fait semblant d'être un piètre danseur, Astaire sort le grand jeu pour faire glisser Ginger sur la piste (et lui faire garder son travail de prof de danse, et la faire forcément craquer) : un petit numéro d'une fluidité parfaite digne d'un show en patin à glace avec un sauté de barricade sur la fin absolument prodigieux (je suis tout sucre, today, mon pauvre chat vieux comme Hérode vient de passer sur la table d'opération - O Jizuss, ô Looord,qu’il ressuscite une énième fois, please). Peu à peu nos deux troubadours dansants vont être de plus en plus complices et ce malgré les diverses anicroches d'usage : une ancienne fiancée de Fred qui refera surface, un crroner de salon (de ma grand-mère) tout gominé qui fait du gringue à Ginger... Mais une scène en studio avec plus de neige que dans les Alpes, un bisou volé derrière une porte de loge et un petit numéro de danse où Ginger tourne aussi vite sur elle-même qu'une tête dans L'exorciste auront tôt fait de rendre les deux tourtereaux inséparables. Il faudra malgré tout encore sortir le grand jeu (un fou-rire collégial qui emportera tout sur son passage) pour annuler le mariage programmé de Ginger (en écho à celui d'Astaire au début du film) et notre petit couple pourra enfin repartir en chantant sur les ailes de la danse.
Le film, malgré finalement le peu de numéros musicaux, est sautillant de bout en bout grâce à une musique omniprésente toujours emballante, un caoutchouc man (Fred Astaire auquel j'ai piqué le plié du genou pour jouer à la pétanque - sans réussite jusqu'alors) en pleine bourre et une Ginger avec des grands yeux mauves (ou quasi, le noir et blanc ne permet pas de trancher) toujours prête à faire bondir les cœurs (même avec du shampoing sur la tête, elle est toute mignonne). Astaire, pour garder son rang face à cette nymphe qui l'a fait fondre lors de la petite balade sous la neige, nous sortira un numéro musical de grande classe dans des décors gigantesques en entraînant dans son pas une vingtaine, que dis-je, une trentaine de danseuses à sa suite ; il enchainera avec un numéro absolument éblouissant sur fond d'ombres géantes (on est persuadé que ce sont les siennes projetées jusqu'à ce qu'il rompt lui-même la cadence et se lance dans un solo alors que les ombres continuent de l'accompagner en arrière-fond), un numéro où il montre toute sa classe de claquette-man (on se comprend). Stevens n'a pas besoin de forcer son talent (bon il sort quand même la grue sur le numéro avec mille danseuses) pour rendre cette comédie, musicalement très enlevée, romantique à souhait et on se surprend encore en sortant de la salle (de bain, oui, restons sédentaire) à chantonner ♪ a fine romance ♪ en faisant claquer ses pantoufles sur le tapis de bain (ça rend moins, mais c'est l'envie qui compte). Bref, autant dire qu'on est séduit, totalement. J'ai le droit à une autre CM, grand maître ? Promis, je lirai pas le Nothomb, juré craché sur sa... Bon, pas de zèle, ok.