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10 septembre 2019

Du Mouron pour les petits Oiseaux de Marcel Carné - 1963

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J'ai beau lui redonner sa chance à intervalles réguliers, il va bien falloir reconnaître un jour que je n'aime pas Marcel Carné, à part ça et là quelques petites pépites (Le Jour se lève notamment). En tout cas, au vu de sa filmographie d'après-guerre, on ne peut que soupirer devant ce cinéma poussiéreux comme un vieux tricot de grand-mère resté au-dessus de l'armoire depuis sa mort en 32. On se rend vraiment compte que le gars, privé de ses joujoux fétiches (Gabin, Prévert, Trauner) a très peu de talent : que ce soit à la mise en scène, dans l'écriture du scénar ou dans la direction d'acteurs, Du Mouron pour les petits Oiseaux est assez pitoyable. Le projet de base est déjà assez bordélique : on est dans un immeuble parisien, où se croise tout un univers bon-enfants d'habitants hauts en couleurs. Il y a le gangster reconverti dans l'oisellerie (mais l'est-il vraiment ?), le boucher qui vole sa femme pour nourrir sa maitresse, le mystique allumé, l'homosexuel qui s'écrit des lettres à lui-même pour pouvoir draguer le facteur, la sotte qui saute tous les hommes, le bel Italien hâbleur, l'apprenti harcelé par la cougar, la vieille paralytique qui gambade dès qu'on lui propose un petit beurre, la concierge désabusée... Tout ce beau monde cohabite, avec chacun sa petite part d'originalité, son petit bout d'histoire, ses côtés grandioses et ses petitesses pathétiques. Bon.

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Pendant une bonne heure, Carné cherche un peu ce qu'il pourrait bien faire avec tous ces personnages, et décide de ne pas décider : son film est une suite de sketches qui se chevauchent les uns les autres, la plupart assez pénibles à regarder. Il faut dire que les acteurs, pour la plupart très dilettantes, ne l'aident pas. Entre un Jean Richard en-dessous de tout qui cabotine et fait clairement passer le film dans le camp du comique troupier et Dany Saval, insupportablemrent fausse dans le rôle facile de la poule, entre Jeanne Fusier-Gir, qui nous fait croire à sa vieille gâteuse autant qu'au retour de la gauche et (surtout) Roland Lesaffre, absolument affreux dans ses excès, on ne croit pas une seule seconde à cet univers beaucoup trop caricatural pour être honnête. Seuls Paul Meurisse, dans son éternel rôle de gangster élégant et gouailleur à gants blancs, et la jolie Suzanne Gabriello, qui imprime une douce mélancolie sur cette pochade, s'en sortent bien. Mais de toute façon, même avec de bons comédiens, le film se serait vautré quand même : la vision qu'a Carné de Paris, infâmement nostalgique, apparait comme un fantasme hors-d'âge, et on se dit que cette ville parfaite n'a sûrement jamais existé. A chaque fois qu'un comédien sort de l'immeuble, on a droit à une jolie carte postale de Paris, avec la Tour Eiffel ou Notre-Dame en fond, et on se dit que les belles inspirations de jadis (les superbes constructions du Jour se lève, l'enchantement des rues des Enfants du Paradis) appartiennent bien au passé. Le montage fait saigner les yeux, le scénario patine dans la semoule, et au final le film ne raconte rien, alors qu'il voudrait raconter une bonne dizaine d'histoires. Très supérieur, jamais tendre, Carné regarde tout son petit monde en cynique, les jugeant sans appel, ricanant avec son public devant les vicissitudes minuscules de l'âme humaine. Une sorte d'anti-Renoir, quoi. Pathétique et pénible.

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