Eighth Grade (2018) de Bo Burnham
Les films sur l'adolescence, on est d'accord, c'est un peu notre spécialité... Bon, après, c'est pas forcément celle des Ricains. D'où, vu le plébiscite autour de ce premier film, un début de curiosité : tiens, et si nos amis outre-Atlantique étaient capables de faire preuve pour une fois d’une extrême sensibilité dans une enveloppe forcément un peu trop calibrée... tiens, hein ? Bien, nous voilà donc en présence d'une gamine de 13 ans, Kayla (Elsie Fisher), en train d'enregistrer une vidéo sur son blog (des conseils à deux balles, genre comment se sentir en confiance alors qu'elle n’y connaît nib), des boutons pleins la gueule, un vocabulaire de 24 mots (le mot "cool" revenant une fois sur 3 et "like" une fois sur deux), de la candeur, de la volonté et une pointe de ridicule - bref une ado... Dès le départ, pétons le suspense, on sent qu'il y a là un effort pour faire "naturel" ; malheureusement, on n'est pas chez Claude Miller, pas en présence de Charlotte, mais face à un produit américain où même le naturel le plus pur et dur paraît toujours un peu factice, surtout au niveau du jeu des gamin(e)s qui semblent être tombés dans le moule dès l'éprouvette. Je ne dis pas que cette Elsie-là ne fait pas tout son possible pour sembler à son aise ; il y a juste un truc qui sonne creux, from the very beginning. Ensuite le scénar, même si Bo parfois ose (un gamin de son âge lui parle de fellation, oh mon dieu, il va falloir qu’elle s’adapte et apprenne - les hommes, on le savait, s'exercent aux States sur des american pies, les jeunes filles, on le saura, sur des bananes avec la peau – et vomisse avant même de passer à l’acte – pas prometteur tout ça), il creuse un sillon sur le thème de la taille de la faille de Californie. Elle est mal aimée, elle a un père au petit soin (Josh Hamilton, insupportable dans sa cool attitude) - la mère s'est barrée -, elle est un peu gironde alors que toutes ses copines font une taille xxs, elle voudrait tant s'intégrer mais putain c'est trop dur... Son parcours se passe pourtant relativement tranquillou (une amie plus âgée qui la prend sous son aile, un type plus âgé qui la drague lourdement (ses boutons d'acnée explosent à force de rougir - je surtraduis un peu), un type de son âge aussi maladroit qu'elle qui lui montre de l'intérêt, et toujours ce père si doucereux qu'on aimerait lui couper la langue avec une petite cuillère) : l'Elsie apprend, rougit, grandit, rougit, grandit, bref essaye de faire sa mue avec toute la maladresse du monde mais avec un petit fond de pugnacité sensée lui donner tout son charme... C'est un bel effort, mais tout cela est trop facile, attendu, factice, téléphoné, mou du genou, pour qu'on marche dans cette petite combine so candide et clumsy. Le film se fait une petite place dans les tops 10 et on se dit qu'il y a heureusement sur terre d'autres cinémas que celui sclérosé et engoncé de nos très chers Ricains – même quand ils mettent toute la sincérité qu’ils veulent…