Mandy (2018) de Panos Cosmatos
Nicolas Cage revient au cinéma et il est pas content. Fallait pas lui brûler vive sa femme. Fallait pas. Lui ce solide bucheron tranquille, rangé des voitures et des films, lui qui passait ses soirées à regarder des nanars auprès de sa douce, fallait pas venir l'emmerder. Après quarante minutes un peu ternes (un début de film d'horreur classique où il ne se passe pas grand-chose : présentation des personnages, quelques filtres colorés pour se la péter), on commence d'entrevoir un début de vicissitudes. Oh, rien de bien original non plus : une secte sectaire emmenée par un gourou style Charles Manson avec sa clique de décérébrés (pas les champions du monde du bridge, son crew) décide de s'attaquer à la pauvre femme de Cage : elle fait certes des dessins de SF, écoute de hard (elle a toute une collection de tee-shirt affichant ses goûts) mais elle ne méritait pas le sort qui l'attendait. Ces crétins de hippies de merde avec un discours évangéliste de bas étage, soutenus par deux créatures sorties tout droit de l'enfer (des types en cuir, à l'habit tout clouté et à l'haleine qu'on devine épaisse), torture cette pauvre femme sous les yeux d'un Cage mis hors d’état de nuire. Un massacre, dont il ne restera que des cendres... Et un Cage vénère.
La deuxième heure arrive et l'on sent que le film part enfin : Cage lors d'une séquence d'anthologie se requinque dans ses toilettes à grands coups d'alcool à brûler. Notre homme redevient sauvage et on reconnaît bien là notre fou furieux de Cage capable de tous les excès. Il récupère son arbalète (l'outil à la mode dans les films de genre) chez un type chelou, se fabrique une hallebarde grand crin (je suis un grand fan des hallebardes et regrette sa disparition dans nos temps modernes) et part à la chasse aux créatures infernales et aux hippies sanguinaires. On commence à sourire, le ton est monté d'un cran, Cage ne va plus desserrer les dents. Cosmatos (l'ancien attaquant de l'AEK Athènes recruté par Marseille ?) nous gonfle un peu avec son utilisation outrée de philtres rouge ou bleu ou avec ses discours spirituels de cours de maternelle ; on attend au moins de lui que dans l'action, à défaut d'un fond qui ferait sens (on pensait au départ qu'il serait question de rêve dans le rêve, de film sous influence "littéraire" (de la SF populaire) : non), il sera plus tranchant. Panos (le singulier de Panini, soit un demi-sandwich à la grecque) nous fait relativement plaisir avec ces créatures maudites qui vomissent du sang (Cage et son côté SM), les bouffées de chaleur de Cage (un sniffage de coke en pleine action, une goutte de drogue psychédélique et même un plan sur un animal rampant tout droit échappé d'un film d'Herzog (l'hommage semble évident)) ou encore des combats rigolos (tronçonneuse contre tronçonneuse, c'est forcément fendard). On a même droit, avec ce sacré Panos, à des instants comiques (Cage en rage parce que la créature infernale a niqué son tee-shirt favori ; la tronçonneuse de Cage qui peine à démarrer à son plus grand désarroi...) comme s'il avait abandonné toute ambition par rapport au sérieux de la chose (malgré un départ plombant qui pouvait laisser attendre quelques maigres prétentions intellectuelles - nan nan nan). Cage tranche dans le gras et finit tout sanguinolent et hilare. Au moins le gars s'est défoulé et nous a permis de nous faire marrer ici ou là... C'est bien tout ce qu'on retiendra de ce nouvel opus avec un Cage en free lance, libre et open.