LIVRE : Libérons-nous ! d'Abdennour Bidar - 2018
Shangols se fait politique, parce que y en a marre, on nous spolie. Voilà donc un essai publié par le philisophe Abdennour Bidar et portant sur le revenu universel, ce bidule qui effraie tant ma maman et qui met en joie mon voisin chômeur (mais qui vote pas Hamon, faut pas pousser, tous des crevures). Plus un livre politique, donc, puisque le gars se fait le chantre de ce revenu minimum accordé à tous et inconditionnellement, et que son bouquin a tout d'un programme de campagne, dans sa première partie tout au moins. Et dans cette partie-là, c'est vrai qu'on le suit sans problème. Les deux plaies de la société actuelle sont : l'esclavagisme induit par la domination de quelques riches envers les plus pauvres, et le besoin frénétique de consommation, qui nous fait désirer ardemment le dernier I-Pad i-677 7'inch new generation à tout prix, on est d'accord avec le constat. La solution pour lutter contre ces deux ennemis : donner une somme minimum à tous pour qu'ils aient le choix de travailler ou non, pour s'épanouir, pour repenser dans son entier notre rapport à l'argent, au capitalisme, et pour fermer leur gueule aux puissants de la planète. On apprécie cette colère qui se cache sous la neutralité des concepts scientifiques, l'écriture de Bidar est moche mais claire, on a plus d'une fois le poing qui se lève devant la justesse de l'analyse et on est prêt à signer. On se dit qu'en 3489, quand la question sera enfin à l'ordre du jour, on sera dans les premiers à se battre pour cette opportunité de mettre tout le monde sur un pied d'égalité à la base : échapper à la misère des plus démunis, faire en sorte que plus persone ne soit dans la dèche complète, repenser le loisir, redéfinir le travail en terme d'épanouissement personnel, mettre à bas le culte du travail (qui n'est en fait que le culte du capitalisme), mettre à bas la poignée de dominants qui dirigent le monde avec notre complicité, c'est oui. On se dit que Bidar est tout de même un peu utopiste quand il clame que le solution du problème ne peut être que mondiale et non pas nationale, on a un peu de mal à imaginer la Corée du Nord, l'Inde ou même les USA adopter le revenu universel, mais on ferme les yeux sur l'infaisabilité (actuelle, hein, je dis pas) de la chose, sur l'immense boulot qui consisterait à faire changer les mentalités des politiques (qui appartiennent de fait au camp des dominants), et on y croit, le temps de ces quelques pages intelligentes, convaincantes, qui ne s'enfoncent pas dans la théorie pure et dessinent une utopie crédible.
Ensuite c'est plus douteux. Dans la deuxième moitié, Bidar abandonne son ton politique pour se faire plus philosophe, s'interrogeant sur le temps libre que le revenu universel nous donnerait, sur son emploi possible, voire sur l'angoisse consistant à se trouver face au choix de bosser ou pas, et face à ces vacances soudaines. Il se met alors à rêver d'une société à la Montaigne, où tous serait occupé à se cultiver, à s'émanciper, à devenir plus libre, dans des maisons du temps libre qui seraient dévolues à ça, dans des écoles tournées vers l'apprentissage de la liberté et dans des rapports humains enfin renouvelés. On se dit que utopiste c'est bien, mais naïf c'est mal. Je suis pour ce revenu universel, qui règlerait, j'en suis sûr, énormément de problèmes actuels. Mais que mes voisins, qui à 50 ans en sont à l'apprentissage de la lettre "GAAAaaaa" se mettent à lire Montaigne et à apprécier la peinture abstraite, j'ai plus de doutes. Bidar ferait mieux de rester concret ; quand il rêve, il devient niais. Complètement déconnecté de la réalité, il s'adresse à une toute petite frange de la société. Dommage que son livre se perde ainsi dans la science-fiction : quand il a plus les pieds sur terre, il est convaincant, simple et très clair. Pour les pin's "Votez Hamon", envoyez à Gols qui fera passer.